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L'Homme et le Cosmos

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Message  Freya Lun 29 Mai 2017 - 16:20

Les Traditions

Selon les observations les plus anciennes, l’Homme, de par sa constitution, reflèterait le cosmos au sein de l’organisation globale.

Les hommes de la fin de la Renaissance et du début du XVIIe siècle se faisaient de la littérature hermétique une idée très différente de la nôtre. D’abord, ils attribuaient à Hermès-Thot ou Hermès Trismégiste, d’autres textes que ceux qui constituent pour nous le Corpus Hermeticum, tel que nous le connaissons à travers des manuscrits médiévaux. Ils accordaient en particulier une grande importance à la Table d’Emeraude, bref texte de douze aphorismes obscurs, dont le plus célèbre affirme que « ce qui est en bas est comme ce qui est en haut » et « ce qui existe dans le plus grand monde (le macrocosme) est comme ce qui existe dans le monde le plus petit (microcosme) »*. Le macrocosme, le plus grand monde, figure donc l’Univers, et l’Homme le microcosme, le monde le plus petit. Notre conscience étant notre seul moyen de mesurer l’existence, nous ne pouvons donc admettre que les seuls éléments du cosmos qui se reflètent dans notre expérience humaine totalement reliée à notre constitution physique et mentale.

Très tôt, les anciens Egyptiens ont établi le lien spirituel symbolique unissant l’être humain, l’espace et le nombre. Dans l’Ogdoade d’Hermopolis, c’est-à-dire un groupe de huit dieux désignant les quatre couples de forces élémentaires qui précédèrent la création du monde. Les deux premiers : Noun et Naunet incarnaient l‘eau primitive ; Heh et Heher l’infinité spatiale ; Kek et Keket les ténèbres ; Amon et Amonet qui, selon la tradition portent des noms différents évoquant le Néant, le Vide ou encore l’indétermination spatiale. Il ne s’agit donc pas de divinités mais de personnification des éléments du chaos précédant la création. Forces obscures d’un monde encre inorganique, ces huit dieux ont l’aspect de grenouilles et de serpents, créatures spontanées des eaux primordiales.

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Les théories alchimiques du XVIIe siècle furent souvent appelées hermétiques pour marquer leur attachement à une tradition indépendante de l’aristotélisme et du galénisme, dont Hermès-Thot ou Hermès Trismégiste, aurait été le fondateur. Jusqu’au début du XVIIIe siècle, toutes les branches de la philosophie et de la religion reconnaissaient cette relation de l’humain au cosmos. Augustin d’Hippone (354-430) reconnaissant cette tradition, l’incorpora dans l’orthodoxie chrétienne lorsqu’il écrivit : « Dieu plaça donc sur terre l’homme qu’Il avait créé, comme si c’était un autre monde, le grand monde dans le petit ». Dans la même foulée, Grégoire de Nazianze (329-390) constata : « Chaque créature, tant le ciel que la terre, est en l’homme ». Girolamo Zanchi (Hieronymus Zanchius en Latin) (1516-1590) affirme dans son De Opera Dei (Des Œuvres de Dieu) certifie : « Le corps de l’homme est l’image du monde et il est donc appelé microcosme ».

Du côté de l’ancienne Tradition celtique, le barde Taliesin (518-599) a écrit deux poèmes : « Le Grand Monde » (Canu y Byd Mawr) et « Le Petit Monde » (Cany y Byd Bychan). Les descriptions bardiques dépendantes de la philosophia perennis, prennent quelques fois des aspects quelque peu similaires à ceux de la théologie chrétienne. Leurs enseignements sont progressifs : viennent d’abord es éléments de composant le cosmos puis, la démonstration de la relation entre le cosmos, l’être humain et le divin. Le texte bardique Les triades du Bardisme ou Triades de Ionabwy contient un passage appelé Les Eléments (Yr Elfyddennau) décrivant la structure symbolique de l’existence : les éléments. Il y avait un système à trois éléments, le plus ancien, et un autre, ultérieur,  à cinq éléments quand la Tradition bardique fut capable de créer une synthèse du système celtique tripartite et des quatre éléments de la cosmologie symbolique hermétique. (Je n’entre volontairement pas dans les détails car ils sont susceptibles de faire l’objet d’un sujet à part).

Près de mille ans plus tard, l’occultiste allemand, Henri-Corneille Agrippa de Nettesheim (1486-1535) expliquait dans sa Philosophie occulte : « Dieu créa l’Homme d’après Sa propre image ; car de même que le monde est une image de Dieu, l’Homme est donc l’image du monde », phrase dont les lecteurs ne retinrent que la première partie…


La place de l’Etre Humain dans le Cosmos

Tant dans l’espace que dans le temps, la place de l’Etre Humain dans le Cosmos est largement reliée à la structure de son corps. Nous sommes des êtres bilatéralement symétriques avec ce qui est devant, derrière, à gauche, à droite, en haut, en bas, en-dehors et en dedans de nous. Et c’est ainsi que nous envisageons le monde. Cette perception du monde, que nous la reconnaissions ou non, est innée dans notre constitution et affecte totalement notre explication de la nature de la réalité. Chacune de nos expressions, chaque objet qui nous entoure, sont rattachés à la structure de notre corps.

Dans la Tradition nordique, la place de l’Etre Humain dans le Cosmos figure dans le mythe du Géant primordial Ymir dont le corps démembré est réparti pour former le monde archétypal. Cette perception constitue la base du raisonnement de l’occultisme occidental classique « ce qui est en haut est comme ce qui est en bas » indique les correspondances entre le monde de l’existence extérieure et le monde intérieur de la conscience humaine. Et c’est cette réalité qui se trouve au sein de notre culture. L’écriture, les symboles, l’art, l’architecture, la technologie et même la guerre sont tous structurés en fonction de la nature et des besoins de notre corps physique.  

Toujours dans la Tradition nordique, le monde est divisé en quatre parties et en huit directions. Cette division découle directement de la structure même du corps humain et de son interaction avec le monde physique et les évolutions de notre planète sur laquelle nous vivons et nous nous mouvons. Nous nous trouvons au centre de cette division en quatre parties qui sont : la source, le germe, l’origine et l’ombilic, division à partir de laquelle chacun d’entre nous s’est développé en tant qu’embryon dans l’utérus de notre mère. Notre ombilic est donc l’empreinte qui nous reste du cordon ombilical, véritable point central, qui nous reliait au placenta de l’utérus de notre mère. On retrouve cet ombilic et point central, dans le mythe du Géant Ymir mort dépecé lors de la création du monde et où chacune de nos parties trouve une composition correspondante dans le monde.

L’ombilic des sites grecs comme l’omphalos de Delphes, reprend le thème du point central et donc celui du Géant Ymir mort lors de la création du monde. Ce modèle d’un point central dans notre monde, relié par un axe au monde supérieur au-dessus et au monde inférieur en-dessous, est la base de la cosmologie sacrée traditionnelle et la structure des systèmes religieux celtes, baltes et germaniques. En l’absence de cette structure stable de la société, ce sont le chaos et la désintégration qui règnent.

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L'omphalos de Delphes (Grèce)

Vu que l’esprit de l’être humain entoure le corps physique et que son corps occupe une position dans l’espace, on percevait jadis l’âme du lieu (anima locus) à un endroit caractéristique, l’omphalos ou l’ombilic local. Tout comme il est possible de se faire une idée de l’esprit d’un être humain séparé de son essence divine, l’esprit d’un lieu est séparé en tant que centre local et identique au point central primordial. Tel est le mystère de la relation entre le microcosme et le macrocosme : « ce qui en haut est comme ce qui est en bas ».  L’omphalos ou ombilic de la terre est le symbole du point fixe qu’il est possible d’atteindre par des états de conscience modifiée et l’évolution spirituelle. Le mythe de la mort du dragon comme dans les histoires de Siegfried ou Beowulf, pour ne citer que les plus connus, contiennent la découverte de lieux de pouvoir symboliques. Cependant, l’immobilisation symbolique du dragon est bien plus importante que sa mise à mort. On trouve un équivalent dans les mythes norrois où l’on tente d’entraver des êtres démoniaques comme le dieu Loki, ses fils le loup Fenrir et Jörmungand, le Serpent du Monde. Vaincus, ils sont attachés et envoyés dans le monde inférieur où, tourmentés moralement, leurs mouvements provoquent les tremblements de terre périodiques. En Suisse, la connexion entre le démon entravé et les tremblements de terre fait l’objet d’une légende. Près d’Interlaken, la grotte appelée la « Beatushöle », est sise sur une faille tectonique majeure. Quant à Jörmungand, le Serpent du Monde, une autre légende raconte que lorsqu’il se déplace sur le fond des océans, les chaînes qui l’entravent se meuvent en même temps que les plaques tectoniques, et leur tremblement occasionnel, en faisant vibrer les "os" de la Terre, génère les raz-de-marée. En dépit de tous ces déplacements cataclysmiques, l’axe cosmique, le seul, n’est nullement ébranlé, car il possède l’immobilité et la permanence qui font défaut à la Terre elle-même.

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*[Nous savons aujourd’hui que ce texte, dont circulaient plusieurs versions latines et françaises, est extrait d’un ouvrage arabe, le Livre du secret de la création, dans lequel la Table d’Emeraude est présentée comme la traduction d’un texte grec attribué à Balinus, c’est-à-dire Apollonius de Tyane, attribution qui reste peu probable, même si l’on peut supposer qu’il y eut un original grec aujourd’hui disparu].
Freya
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