Dionysos et compagnie
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Dionysos et compagnie
Le brigadier, un gros bâton de poirier savant, paré d'une pièce de velours rouge bordée de clous dorés, manipulé par un invisible marionnettiste, s'avance sur la scène en se dandinant, puis il s'immobilise, un peu penché, au dessus du milieu du plancher, devant le rideau, et d'un coup d'un seul, il frappe trois fois.
Le rideau, pourpre, s'ouvre sur une salle de classe et sous les applaudissements.
***
On voit quelques élèves de profil, assis sur la gauche de la scène, ils rient et se moquent de l'un de leurs camarades.
À droite, au tableau, le professeur, en blouse blanche, cesse ses inscriptions et se retourne vers la classe :
- S'il vous plait, calmez-vous et dites séant ce qui me vaut le déshonneur de vous voir vous désintéresser de mes graphiques. Mademoiselle Praxithée, la couleur de votre visage en dit long sur la familiarité de vos pensées, mais pourquoi donc riez-vous ?
Praxithée reprenant son sérieux:
- Mais m'sieur j'ai rien fais sauf regarder vos graphitiques intentionnellement.
Baissant les yeux :
- C'est pas ma faute à moi si Érichton il a des pieds de dragon.
Les rires reprennent pour une demi seconde et le professeur Cécrops, avec maîtrise, frappe son bureau de sa verge de bouleau pour imposer le silence :
- Cessez ces sornettes ! Gare à vos fessiers !
Dans le silence revenu, le professeur descend de l’estrade et faisant face au public, montre les pieds d'Érichton en s'ouvrant de la main droite :
- Mais oui, regardez le !
Sous la table, Érichton tortille ses pieds énormes et verts.
Cécrops, toujours face au public, faisant passer son bras gauche à droite de son corps pour désigner Érichton des deux mains, d'une voix solennelle comme celle d'un auguste tyran présidant sa propre apothéose, entonne d'une voix profonde, ciblant le pathos de ses auditeurs :
- C'est lui Érichton, l'enfant aux pieds de dragon ! Regardez-le mais ne vous moquez pas. Regardez-le pour apprendre à le connaitre et pour pouvoir le reconnaître. Il est ici pour savoir comment devenir Roi et pour y parvenir il devra connaitre l'écriture, afin d'éditer des lois, et maîtriser l'architecture, pour être en mesure d'édifier un temple à la gloire d'Athéna, dans le but de s'assurer son soutient et la victoire ! Il ne faut pas mesurer la noblesse d'une personne à la longueur ou à la couleur de ses doigts de pieds, l'aulne d'un vivant se juge à la volonté qu'il a pour accomplir sa destinée !
Cécrops se tourne alors vers le prévenu, pose ses mains sur le bureau et se penche sur Érichton qui se ratatine sur son pupitre en levant la tête vers son maître :
- Érichton , vous êtes bien là pour étudier la voie de l'accomplissement de vos devoirs, n'est-ce pas ?
Érichton acquiesce et ouvre de grands yeux, puis une large bouche silencieuse en s'accrochant au bureau de toutes ses mains.
Les autres enfants quittent des yeux les pieds de l'hybride de reptilien pour étudier sa tête. Le couvre chef informe de l'enfant monstrueux se met à briller et se transforme en couronne. Ils disent en choeur :
- Hôôooooooo ....
Dans le fond de la classe, Amphictyon se lève et s'exclame :
- Et bien, ce futur roi d’Athènes n'est pas plus mal qu'un autre !
Le rideau se ferme alors que Cranaos, qui au premier rang détachait son attention du tableau pour se retourner, blême de rage, brisait les crayons qu'il tenait en main en regardant méchamment Amphictyon qui se trouvait derrière lui.
***
Fin de la scène, une draperie passe inaperçue devant le rideau qui se rouvre sous le couvert d'un voile percé d'un paquet de trous prenant l'apparence d'un ciel étoilé.
Assis au premier rang, Zeus retire ses binocles et quitte la scène des yeux. D'un coup de foudre saisissant l'instant comme un polaroid autodéclancheur il s'adresse à Perséphone :
- N'avez-vous pas trouvé cela divertissant, chère âme ?
- C'était divin, époustouflant à vous coupez le souffle, j'ai failli défaillir, il s'en fallait de peu de je demandasse à pouvoir faire une pause de ma contemplation de cette action pourtant si intéressante.
Perséphone joint ses mains pour supplier le Dieu :
- Mais maintenant je respire à nouveau et mon coeur bat sans retenue, je me langui de savoir la suite, dîtes moi, qu'advient-il de l'autochtone, l'enfant aux pieds de dragon ?
- Hahaha, ce n'est pas encore le moment pour vous de le savoir car je laisse à cette troupe savante le loisir de combler vos humeurs oisives par la contemplation de leur prestation. Allons, ne vous languissez point, l'action reprend dans 10 minutes, jouissez donc de ma compagnie pendant l'entracte.
- Certes, je me réjouis, mais je reste sur ma faim.
Dit-elle d'un air mutin.
- Ha, alors je sais comment vous faire patienter.
Zeus tourne la tête vers son voisin de gauche et lui dit :
- Dionysos, par hasard et par intermittence du spectacle, voudrais-tu aller nous chercher du pop-corn ?
Dionysos, joignant le geste à la parole :
- Par les vignes et par le pinard, oui mon père, j'y vais de ce pas !
Dionysos arrive au bar, il attend pour passer sa commande.
Un homme noir en costume banalisé arrive derrière lui, il lui dit en aparté avec une voix de basse :
- Je suis Anubis, on m'appelle le professeur bandelette, si un jour tu te fais couper en morceaux tu n'auras qu'a m'appeler si tu veux que je recolle le tout en un ensemble cohérent. Passant sa main droite de gauche à droite devant les yeux de son prospect tel Obi Wan Kenobi il ajoute: Vois qu'il est important pour toi de me prendre en considération.
L'homme noir en costume tend sa carte de visite.
Dionysos, nonchalamment accoudé au bar, buvant un dry gin qu'il vient de faire apparaître entre ses mains, demande à l'homme :
- Est ce que tu vas à un bal masqué où est ce que tu as vraiment une tête de chien ?
- J'ai une tête de chacal. Qu'est ce que ça peut changer pour toi si je suis ou pas la même chose que ce que tu vois de moi ?
- Ça je l'ignore, je suppose que cela dépend de ce que tu es, vu de l'intérieur. Est-ce que tu vois du pop-corn de là où tu te trouves ? Je cherche des céréales.
L'homme noir à tête de chacal se casse en deux, une main sur la hanche, l'autre sur le ventre, le museau vers le sol, il éternue violemment par le nez en secouant la tête puis se redresse et remet sa carte de visite dans sa poche.
Anubis - Vas-tu faire fermenter tes céréales ?
Dionysos - Qu'est ce que ça peut changer pour toi de savoir si je vais utiliser la cuisson à froid ou à chaud ?
Anubis - Ça ne change rien globalement mais l'information m’intéresse. Si un jour tu inventes le pop-corn froid tu me diras, en attendant pour tout ce que tu pourrais trouver qui pousse dans ou au dessus de la terre, Osiris te le dira sans se faire prier, je crois. L'homme vert, là bas dans l'autre histoire.
Dionysos - Quelle autre histoire ?
Anubis - L'histoire de l'homme vert.
Il fit une pause pour compter ses morceaux, il lui en restait un dans chaque main: le verbe et la géométrie.
Il se dit à lui même in peto: "je ne suis pas certain qu'il m'en reste plusieurs ... ou pas ... et inversement ..."
Avisant qu'il serait avisé de rendre visite à l'homme vert et gloire à Dieu, il se mit en chemin, alors l'herbe poussa sur son côté.
Ne se souvenant plus de l’apparence de lui même sous son nom divin, l'être dionysiaque cheminant de par le monde par l'action qui l'agitait de l'intérieur, alors épris d'un instant d'émotion, l'esprit sans limite de la forme informe qui se mouvait dans la voie de sa propre révélation, décida de devenir un individu de l'espèce humaine : il était donc en chemin pour devenir quelqu'un.
S’avançant sur le passage, une lanterne à la main, en plein jour, hâlant le chaland et hélant les passants, celui-ci s'écriait :
- Je cherche un nom !
Les passants passaient et l"ignoraient, vacant à leurs préoccupations ordinaires. Le missionnaire de sa propre humanité en quête d'identité se dit alors : - Je vais méditer dans une grotte, car ma nature interne en accord avec la nature externe me suggère que j'aurai plus de succès comme anachorète plutôt que comme prophète.
Et de joindre le geste à la parole en emboîtant le pas des plantigrades qui pratiquent le jeun hivernal.
Comme le beau temps vient après la pluie, la faim revient après qu'on ait été repus. Le marcheur qui s'était échoué en haut de sa montagne, par une idée fugace, fit face à ses anciens démons et décida d'en finir. Il redescendit de son équilibre instable des sommets vers les abysses des cités des paysans.
Alors qu'il dépassait les pâtures et entrait entre les champs, un gendarme en monture l'avisa pour lui demander s'il était muni d'un laissé passé. Comme il n'en n'avait point et que dans sa folie il ignorait jusqu'à son nom, il faillit avoir des ennuis, car l'homme de loi, qui était d'une faction préparé à l'action, n'était point formé pour la réflexion. Cependant le gendarme arrêta la voyageur. Il le fit entrer dans la cité, entravé, pieds et poins liés, puis il le fit entrer au palais de la Justice et le présenta au juge, le ministre de celle-ci, qui lui dit ceci, en substance : - Je n'ai pas le temps aujourd'hui de m'occuper de toutes les personnes comme vous qui exploitent le vice de pouvoir ne rien faire et qui profitez sinon de l'absence de définition du concept de péché de non assistance à l'action de l'harmonie universelle, au moins du relatif vide juridique sur les modalités de la mise en oeuvre de devoir d'action de chacun pour le bien commun, m'obligeant conséquemment à m'exprimer en personne pour le cas particulier lorsque le particulier en question trouve comme emploi de se faire présenter à moi. Je vous interrogerai plus tard pour statuer de votre cas, en attendant apprenez notre langage si vous voulez savoir répondre à mes futures questions et protéger ainsi vos intérêts. Signez ce papier où vous promettez de vous présenter à mes prochaines convocations et disparaissez de ma vue, monsieur Osiris.
Osiris, à moitié amnésique, sortit du tribunal avec une belle paire de cornes sur la tête. Sous une lune couleur miel, il se promenait sur la place du village. Il se souvenait qu'avant de venir ici, il habitait dans les forêts, dans les plaines et les vallées, sur les montagnes et sur les mers, au bords des rivages des rivières et des océans, sous la neige et sous le soleil, sur la terre et sur les vents. Il se souvenait de sa vie de nomade mais il n'avait plus la force de rester solitaire.
Il imagina des champs pour nourrir les peuples vivants dans les communautés. Il vit de grandes collectivités.
- Tu vas avoir besoin de murs solides pour constituer une enceinte fortifiée pour défendre ta ville contre les pillages et les envahisseurs.
Osiris, devenu vert, toisa Gilgamesh qui venait de l'interrompre dans ses réflexions.
L'homme Vert, l'homme des bois répondit du tac au tac : - Non, je n'aurai pas besoin de murs pour protéger les cités, les cités sauront être prospères et offriront à tous l'hospitalité, ce qui est donné ne peut pas être voler et les villes n'ont pas besoin d'autre protection que la bonne volonté des volontaires qui veulent y séjourner, ce qui me parait élémentaire.
Gilgamesh le gros guerrier : - Oui, tu auras besoin de briques pour construire des murs durables et stables. Non pas de la terre qui part en alluvion dans les orages de la mousson, mais de la brique cuite au four, aussi durable que la céramique. Tu ne peux pas te permettre de jouer la sécurité de tes administrés sur la confiance que tu portes aux étrangers.
Monsieur V : - J’achèterai les nations, pour ne pas enflammer la convoitise il suffit de partager le revenu du travail de nos employer.
Monsieur G : - Tu ne peux pas payer les non travailleurs avec le revenu des employés, tu cours au désastre.
Monsieur V : - Bien sûr que oui ! Je dois et je peux nourrir les enfants aussi longtemps qu'ils sont innocents et ne sont pas suffisamment savants pour travailler. Ils travailleront quand ils seront grands, ils méritent de vivre avant de devoir travailler !
Le gros guerrier se gratte la tête, puis il propose, en levant le sourcil gauche et en plissant l’œil droit : - Et si on faisait de super belles tourelles surplombant d’architecturales et artistiques arcades où perceraient les portes de murs concentriques, séculaires et cyclopéens circonscrivant votre cité par des motifs labyrinthiques.
Monsieur V voyait déjà vibrer la fibre de son écharpe couleur d'étendard. Il signait le contrat de partenariat.
Le rideau, pourpre, s'ouvre sur une salle de classe et sous les applaudissements.
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On voit quelques élèves de profil, assis sur la gauche de la scène, ils rient et se moquent de l'un de leurs camarades.
À droite, au tableau, le professeur, en blouse blanche, cesse ses inscriptions et se retourne vers la classe :
- S'il vous plait, calmez-vous et dites séant ce qui me vaut le déshonneur de vous voir vous désintéresser de mes graphiques. Mademoiselle Praxithée, la couleur de votre visage en dit long sur la familiarité de vos pensées, mais pourquoi donc riez-vous ?
Praxithée reprenant son sérieux:
- Mais m'sieur j'ai rien fais sauf regarder vos graphitiques intentionnellement.
Baissant les yeux :
- C'est pas ma faute à moi si Érichton il a des pieds de dragon.
Les rires reprennent pour une demi seconde et le professeur Cécrops, avec maîtrise, frappe son bureau de sa verge de bouleau pour imposer le silence :
- Cessez ces sornettes ! Gare à vos fessiers !
Dans le silence revenu, le professeur descend de l’estrade et faisant face au public, montre les pieds d'Érichton en s'ouvrant de la main droite :
- Mais oui, regardez le !
Sous la table, Érichton tortille ses pieds énormes et verts.
Cécrops, toujours face au public, faisant passer son bras gauche à droite de son corps pour désigner Érichton des deux mains, d'une voix solennelle comme celle d'un auguste tyran présidant sa propre apothéose, entonne d'une voix profonde, ciblant le pathos de ses auditeurs :
- C'est lui Érichton, l'enfant aux pieds de dragon ! Regardez-le mais ne vous moquez pas. Regardez-le pour apprendre à le connaitre et pour pouvoir le reconnaître. Il est ici pour savoir comment devenir Roi et pour y parvenir il devra connaitre l'écriture, afin d'éditer des lois, et maîtriser l'architecture, pour être en mesure d'édifier un temple à la gloire d'Athéna, dans le but de s'assurer son soutient et la victoire ! Il ne faut pas mesurer la noblesse d'une personne à la longueur ou à la couleur de ses doigts de pieds, l'aulne d'un vivant se juge à la volonté qu'il a pour accomplir sa destinée !
Cécrops se tourne alors vers le prévenu, pose ses mains sur le bureau et se penche sur Érichton qui se ratatine sur son pupitre en levant la tête vers son maître :
- Érichton , vous êtes bien là pour étudier la voie de l'accomplissement de vos devoirs, n'est-ce pas ?
Érichton acquiesce et ouvre de grands yeux, puis une large bouche silencieuse en s'accrochant au bureau de toutes ses mains.
Les autres enfants quittent des yeux les pieds de l'hybride de reptilien pour étudier sa tête. Le couvre chef informe de l'enfant monstrueux se met à briller et se transforme en couronne. Ils disent en choeur :
- Hôôooooooo ....
Dans le fond de la classe, Amphictyon se lève et s'exclame :
- Et bien, ce futur roi d’Athènes n'est pas plus mal qu'un autre !
Le rideau se ferme alors que Cranaos, qui au premier rang détachait son attention du tableau pour se retourner, blême de rage, brisait les crayons qu'il tenait en main en regardant méchamment Amphictyon qui se trouvait derrière lui.
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Fin de la scène, une draperie passe inaperçue devant le rideau qui se rouvre sous le couvert d'un voile percé d'un paquet de trous prenant l'apparence d'un ciel étoilé.
Assis au premier rang, Zeus retire ses binocles et quitte la scène des yeux. D'un coup de foudre saisissant l'instant comme un polaroid autodéclancheur il s'adresse à Perséphone :
- N'avez-vous pas trouvé cela divertissant, chère âme ?
- C'était divin, époustouflant à vous coupez le souffle, j'ai failli défaillir, il s'en fallait de peu de je demandasse à pouvoir faire une pause de ma contemplation de cette action pourtant si intéressante.
Perséphone joint ses mains pour supplier le Dieu :
- Mais maintenant je respire à nouveau et mon coeur bat sans retenue, je me langui de savoir la suite, dîtes moi, qu'advient-il de l'autochtone, l'enfant aux pieds de dragon ?
- Hahaha, ce n'est pas encore le moment pour vous de le savoir car je laisse à cette troupe savante le loisir de combler vos humeurs oisives par la contemplation de leur prestation. Allons, ne vous languissez point, l'action reprend dans 10 minutes, jouissez donc de ma compagnie pendant l'entracte.
- Certes, je me réjouis, mais je reste sur ma faim.
Dit-elle d'un air mutin.
- Ha, alors je sais comment vous faire patienter.
Zeus tourne la tête vers son voisin de gauche et lui dit :
- Dionysos, par hasard et par intermittence du spectacle, voudrais-tu aller nous chercher du pop-corn ?
Dionysos, joignant le geste à la parole :
- Par les vignes et par le pinard, oui mon père, j'y vais de ce pas !
Dionysos arrive au bar, il attend pour passer sa commande.
Un homme noir en costume banalisé arrive derrière lui, il lui dit en aparté avec une voix de basse :
- Je suis Anubis, on m'appelle le professeur bandelette, si un jour tu te fais couper en morceaux tu n'auras qu'a m'appeler si tu veux que je recolle le tout en un ensemble cohérent. Passant sa main droite de gauche à droite devant les yeux de son prospect tel Obi Wan Kenobi il ajoute: Vois qu'il est important pour toi de me prendre en considération.
L'homme noir en costume tend sa carte de visite.
Dionysos, nonchalamment accoudé au bar, buvant un dry gin qu'il vient de faire apparaître entre ses mains, demande à l'homme :
- Est ce que tu vas à un bal masqué où est ce que tu as vraiment une tête de chien ?
- J'ai une tête de chacal. Qu'est ce que ça peut changer pour toi si je suis ou pas la même chose que ce que tu vois de moi ?
- Ça je l'ignore, je suppose que cela dépend de ce que tu es, vu de l'intérieur. Est-ce que tu vois du pop-corn de là où tu te trouves ? Je cherche des céréales.
L'homme noir à tête de chacal se casse en deux, une main sur la hanche, l'autre sur le ventre, le museau vers le sol, il éternue violemment par le nez en secouant la tête puis se redresse et remet sa carte de visite dans sa poche.
Anubis - Vas-tu faire fermenter tes céréales ?
Dionysos - Qu'est ce que ça peut changer pour toi de savoir si je vais utiliser la cuisson à froid ou à chaud ?
Anubis - Ça ne change rien globalement mais l'information m’intéresse. Si un jour tu inventes le pop-corn froid tu me diras, en attendant pour tout ce que tu pourrais trouver qui pousse dans ou au dessus de la terre, Osiris te le dira sans se faire prier, je crois. L'homme vert, là bas dans l'autre histoire.
Dionysos - Quelle autre histoire ?
Anubis - L'histoire de l'homme vert.
Il fit une pause pour compter ses morceaux, il lui en restait un dans chaque main: le verbe et la géométrie.
Il se dit à lui même in peto: "je ne suis pas certain qu'il m'en reste plusieurs ... ou pas ... et inversement ..."
Avisant qu'il serait avisé de rendre visite à l'homme vert et gloire à Dieu, il se mit en chemin, alors l'herbe poussa sur son côté.
Ne se souvenant plus de l’apparence de lui même sous son nom divin, l'être dionysiaque cheminant de par le monde par l'action qui l'agitait de l'intérieur, alors épris d'un instant d'émotion, l'esprit sans limite de la forme informe qui se mouvait dans la voie de sa propre révélation, décida de devenir un individu de l'espèce humaine : il était donc en chemin pour devenir quelqu'un.
S’avançant sur le passage, une lanterne à la main, en plein jour, hâlant le chaland et hélant les passants, celui-ci s'écriait :
- Je cherche un nom !
Les passants passaient et l"ignoraient, vacant à leurs préoccupations ordinaires. Le missionnaire de sa propre humanité en quête d'identité se dit alors : - Je vais méditer dans une grotte, car ma nature interne en accord avec la nature externe me suggère que j'aurai plus de succès comme anachorète plutôt que comme prophète.
Et de joindre le geste à la parole en emboîtant le pas des plantigrades qui pratiquent le jeun hivernal.
Comme le beau temps vient après la pluie, la faim revient après qu'on ait été repus. Le marcheur qui s'était échoué en haut de sa montagne, par une idée fugace, fit face à ses anciens démons et décida d'en finir. Il redescendit de son équilibre instable des sommets vers les abysses des cités des paysans.
Alors qu'il dépassait les pâtures et entrait entre les champs, un gendarme en monture l'avisa pour lui demander s'il était muni d'un laissé passé. Comme il n'en n'avait point et que dans sa folie il ignorait jusqu'à son nom, il faillit avoir des ennuis, car l'homme de loi, qui était d'une faction préparé à l'action, n'était point formé pour la réflexion. Cependant le gendarme arrêta la voyageur. Il le fit entrer dans la cité, entravé, pieds et poins liés, puis il le fit entrer au palais de la Justice et le présenta au juge, le ministre de celle-ci, qui lui dit ceci, en substance : - Je n'ai pas le temps aujourd'hui de m'occuper de toutes les personnes comme vous qui exploitent le vice de pouvoir ne rien faire et qui profitez sinon de l'absence de définition du concept de péché de non assistance à l'action de l'harmonie universelle, au moins du relatif vide juridique sur les modalités de la mise en oeuvre de devoir d'action de chacun pour le bien commun, m'obligeant conséquemment à m'exprimer en personne pour le cas particulier lorsque le particulier en question trouve comme emploi de se faire présenter à moi. Je vous interrogerai plus tard pour statuer de votre cas, en attendant apprenez notre langage si vous voulez savoir répondre à mes futures questions et protéger ainsi vos intérêts. Signez ce papier où vous promettez de vous présenter à mes prochaines convocations et disparaissez de ma vue, monsieur Osiris.
Osiris, à moitié amnésique, sortit du tribunal avec une belle paire de cornes sur la tête. Sous une lune couleur miel, il se promenait sur la place du village. Il se souvenait qu'avant de venir ici, il habitait dans les forêts, dans les plaines et les vallées, sur les montagnes et sur les mers, au bords des rivages des rivières et des océans, sous la neige et sous le soleil, sur la terre et sur les vents. Il se souvenait de sa vie de nomade mais il n'avait plus la force de rester solitaire.
Il imagina des champs pour nourrir les peuples vivants dans les communautés. Il vit de grandes collectivités.
- Tu vas avoir besoin de murs solides pour constituer une enceinte fortifiée pour défendre ta ville contre les pillages et les envahisseurs.
Osiris, devenu vert, toisa Gilgamesh qui venait de l'interrompre dans ses réflexions.
L'homme Vert, l'homme des bois répondit du tac au tac : - Non, je n'aurai pas besoin de murs pour protéger les cités, les cités sauront être prospères et offriront à tous l'hospitalité, ce qui est donné ne peut pas être voler et les villes n'ont pas besoin d'autre protection que la bonne volonté des volontaires qui veulent y séjourner, ce qui me parait élémentaire.
Gilgamesh le gros guerrier : - Oui, tu auras besoin de briques pour construire des murs durables et stables. Non pas de la terre qui part en alluvion dans les orages de la mousson, mais de la brique cuite au four, aussi durable que la céramique. Tu ne peux pas te permettre de jouer la sécurité de tes administrés sur la confiance que tu portes aux étrangers.
Monsieur V : - J’achèterai les nations, pour ne pas enflammer la convoitise il suffit de partager le revenu du travail de nos employer.
Monsieur G : - Tu ne peux pas payer les non travailleurs avec le revenu des employés, tu cours au désastre.
Monsieur V : - Bien sûr que oui ! Je dois et je peux nourrir les enfants aussi longtemps qu'ils sont innocents et ne sont pas suffisamment savants pour travailler. Ils travailleront quand ils seront grands, ils méritent de vivre avant de devoir travailler !
Le gros guerrier se gratte la tête, puis il propose, en levant le sourcil gauche et en plissant l’œil droit : - Et si on faisait de super belles tourelles surplombant d’architecturales et artistiques arcades où perceraient les portes de murs concentriques, séculaires et cyclopéens circonscrivant votre cité par des motifs labyrinthiques.
Monsieur V voyait déjà vibrer la fibre de son écharpe couleur d'étendard. Il signait le contrat de partenariat.
Golem- Messages : 64
Date d'inscription : 23/04/2016
Age : 57
Localisation : Soissons
Re: Dionysos et compagnie
Merci Golem pour cette pantomime de Dionysos et Apollon
Regarder de grands danseurs provoque le même émoi que regarder une bûche enflammée : le feu danse, le danseur brûle. C'est le même mouvement, aussi hirsute qu'harmonieux. C'est le combat sans vainqueur entre Dionysos et Apollon, cl'alternance continuelle du danger et de la maîtrise, de la folie et de l'intelligence, du désir et de la plénitude. (tuer le père , Amélie Nothomb )
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