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La THORA, livre sacré

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Message  Freya Jeu 3 Oct 2013 - 12:43

La Thora des Hébreux
Le texte de la Thora a fait l’objet de recherches approfondies, et peut servir d’exemple pour illustrer les réalités historiques sur les sources concernant les autres peuples, telles que les Veda des Indiens, les poèmes homériques ou les Edda des Germains.

1er cycle : erreurs dues à la transmission orale

Les traditions rapportées par la Thora ont été conservées au cours de longs siècles dans la mémoire des hommes, se transmettant par voie orale de narrateur en narrateur. Au cours des siècles, divers changements peuvent avoir lieu. Le fin noyau de vérité se voit grossir d’une écorce épaisse d’additions légendaires, fruit de l’imagination des hommes, de leurs aspirations et de leurs souhaits.

La teneur des coutumes varie selon la capacité de chaque narrateur dans la mémorisation et son habileté dans l’art de l’expression, sans compter les narrateurs tendancieux et malintentionnés, ainsi que les nécessités de revaloriser les traditions anciennes en leur donnant un contenu nouveau. Aussi, faut-il la précaution extrême dans l’utilisation des données que renferment les livres sacrés, afin de déceler le noyau de vérité à travers l’écorce légendaire qui l’entoure et les additions tendancieuses qui les surchargent (1).

2e cycle : erreurs dues aux interpolations successives

Le premier cycle d’erreurs est bientôt suivi d’un deuxième.
Le texte, une fois fixé par écrit, avec toutes les erreurs dues aux narrateurs inhabiles ou tendancieux, avec sa part de vérités et de légendes, le texte écrit subit un deuxième cycle d’erreurs, causées par des interpolations successives visant à l’adapter aux circonstances nouvelles. Prenons par exemple le cas de la Thora : trois versions principales existent, contenant des variantes infinies et des divergences graves. Les Juifs, à partir de l’Exil, au VIe siècle avant notre ère, se sont dispersés dans le monde. Diverses communautés songèrent à compiler l’héritage des aïeux, chacun travaillant à part et sans tenir compte des efforts des autres. Trois versions virent le jour. La version samaritaine (2), qui était en vigueur en Palestine, ne contient que le Pentateuque ou les cinq livres de la Thora imputée à Moïse. Elle fut compilée par les Samaritains mosaïques, les rejetons des Béni Israël, c’est-à-dire des descendants des tribus hébraïques qui s’étaient infiltrées dans le Nord de Canaan.  Les Samaritains mosaïques soutiennent qu’ils constituent la véritable postérité d’Israël, alors que les Juifs  seraient des éléments hétérogènes qui ont interpolé la Thora (3). Des divergences séparent les Samaritains des Juifs dans les domaines cultuel et juridique (4).

La version hébraïque (5), le texte autorisé des Juifs rabbinistes, dit Massorétique (de Massorah : tradition), a été compilée par les Juifs de Babylone et avait cours chez eux. Cette version contient la Thora, les Nabiyyim et les Ketoubim. On a cru au cours de deux millénaires, qu’elle était la seule en vigueur en Palestine (6).

La version grecque ou alexandrine (7) était en usage chez les Juifs d’Egypte. Elle est connue sous le nom de Septante et a pour sigle le nombre soixante-dix (LXX). D’après une tradition recueillie dans une source ancienne, la lettre d’Aristée, Ptolémée II Philadelphe (285-247 avant notre ère), le monarque d’Egypte, aurait convoqué expressément de Jérusalem soixante-douze savants juifs (soixante-dix selon d’autres), et les aurait chargés de traduire la Thora en grec. La traduction, déposée dans la bibliothèque d’Alexandrie, serait plus magnifique que l’original, par inspiration divine (08). Cette tradition a peu de valeur probante : le nombre soixante-dix ou soixante-douze constitue un nombre sacré des Egyptiens, surtout dans le domaine religieux (9). Le rédacteur de la lettre d’Aristée l’aurait adopté afin de revêtir les Septante d’un caractère sacré.

Les deux versions hébraïque et grecque diffèrent énormément entre elles, quant au nombre des livres et quant à leur contenu (10). Les livres communs aux deux versions accusent des divergences infinies, et la version grecque contient plusieurs livres considérés par les tenants de la version hébraïque comme hérétiques et apocryphes (11).

Le Pentateuque Samaritain compte deux mille concordances avec les Septante contre la version hébraïque (12). Les derniers descendants des Samaritains qui vivent en Palestine affirment que leur version est la plus ancienne (13), elle remonte à la période d’avant la scission entre les Samaritains et les Juifs au Ive siècle av. notre ère, bien qu’elle nous soit parvenue par des manuscrits dont le plus ancien date du XIIe siècle de notre ère (14). En fait, il semble que les exemplaires actuels aient subi des interpolations nombreuses, comme ils accusent des variantes de lecture (15), mais les sources anciennes plaident en faveur de l’ancienneté de l’original samaritain par rapport à la version hébraïque. Rabi Gamaliel, l’un des savants du Talmud, atteste que la Thora a été promulguée en samaritain (16). Les écrits de Qumrân contiennent trois versions de la Thora : samaritaine, grecque et hébraïque, divers manuscrits de l’Exode et du Deutéronome, rattachés à l’original des Septante, mais aussi des manuscrits de l’Exode et des Nombres, en paléo-hébreu, qui remontent à un original samaritain (
17). Les inscriptions  d’un temple du IIIe siècle reproduisent le texte du Décalogue d’après la version samaritaine (18).

Les Nabiyyim et les Ketoubim accusent, tout comme les textes de la Thora, des variantes et des divergences. Des versions diverses existaient du même ouvrage, souvent employées côte à côte par la même communauté. Les Qumrâniens, par exemple, utilisaient deux versions d’Isaïe, dont l’une, la plus ancienne, diffère en beaucoup de points du Texte Massorétique ; ensuite deux versions de Jérémie, l’une proche des Septante et l’autre du Texte Massorétique ; de même une version de Samuel contenant des lectures divergentes à la fois des Septante et du texte Massorétique, et une version de Josué et des Rois divergente du Texte Massorétique et proche de celui des Septante (19).

Vers la fin du 1er siècle de notre ère, les Rabbins donnèrent leur approbation à la version hébraïque ; les autres versions furent graduellement prohibées et retirées de la circulation (20).



1. CF. Adolphe Lods. Israël des origines au milieu du VIIIe siècle (1949), p. 171 ss. ; I Kryvelev, Kniga o Biblii, 2e éd., Moscou 1959, Izd-vo Soc. Ek. Lit., p. 241 ss.
2. Editions : Pentateuchus Samaritanus, par H. Peterman & Vollers, Berolini 1891, W. Moeser ; cf. là-dessus : Samuel Kohn, Die Samaritanische Pentateuchübersetzung nach der Ausgabe von Petermann und Vollers, in Zeitschrift der Deutschen Morgenländische Gesellschaft, Bd 47 (1893), p. 626-697. Autre édition August Freiherr von Gall, Der Hebraïsche Pentatteuch der Samaritaner, Giessen 1918, Töpelmann.
3. Cf. James Alan Montgomery, The Samaritans, the earliest Jewish Sect, their History, Theology and Litterature, New York 1907, éd. 1968, Ktav Publishing House, p. 318 ; Encyclopaedia Judaïca, Jérusalem 1971, art. « Samaritans », vol. 14, c. 728. La découverte de la Thora samaritaine remonte à 1616 quand le voyageur Pietro della Valle acheta par hasard à Damas un exemplaire de la Thora samaritaine ; James Alan Montgomery, The Samaritan (1968), p. 286.
4. Voir sur ces divergences : Rabb. Geiger, Neuere Mittheilungen über die Samaritaner V, in Zeitschrifte der Deutschen Morgenländischen Gesellschaft, Bd 20 (1866, p. 143 ss. ; etc.
5. Editions princeps : The Aleppo Codex, provided with Massoretic Notes and pointed by Aaron Ben Asher, the Codex considered authoritative by Maimonides, ed. by Moshe H. Goshen-Gottstein, Jerusalem 1976, The Hebrew University Bible Project. Early Hebrew [[i]/i]Manuscripts in Facsimile, the Damascus Pentateuch, manuscript froma about the year 1000, Jewish National and University Library, Jerusalem, Hebr. Quart. 5702, Part I, ed. by D.S. Loew, Jerusalem, Part II, ed. by Malachi Beit-Arié, Jerusalem, Rosenkilde and Bagger, Copenhagen 1978-1982. Corpus Codicum Hebraicorum Medii Aevi, redigendum curavit Rafael Edelmann, Pars II : The Pre-Massoretic Bible, Codex Reuchlinianus (n°3 of the Badische Landesbibliothek in Karlsruhe), with a general Introduction, Massoretic Hebrew, by Alexander Sperber, Copenhagen 1956, Munksgaard. Etc.
6. Cf. James D. Purvis, The Samaritan Pentateuch and the Origin of the Samaritan Sect. Cambridge, Mass. 1968, Harvard University Press, P. 69, p. 80-83.
7. Edition critique : Septuaginta, Vetus Testamentum Graecum, auctoritate Academiae Scientiarum Gottingensis editum, 16 vol., 1936 ss., Vandenhoeck & Ruprecht. Autres éditions : Septuaginta, id est Vetus Testamentum Graece iuxta, LXX Interpretes, edidit Alfred Rahlfs, 5e éd. Stuutgart 1952, Privilegierte Würtembergische Bibelanstalt, 2 vol. ; Etc.
8. Lettre d’Aristée, 9-11, 30-32, 47-50.
9. Soixante-dix est le décuple de sept, chiffre sacré d’Egypte et du Moyen-Orient. Cf. Jean Chevalier et Alain Gheerbrandt, Dict. des symboles, Paris 1985, Laffont/Jupiter, p. 890 ; etc.
10. Des traductions existent pour chacune de ces versions. La version hébraïque a été traduite en araméen au IIe siècle de notre ère, afin de servir les Juifs de Babylone ; elle est dénommée « Targum », terme qui signifie la traduction. Le Targum de Babylone, dit l’Onqelos, est lui-même d’origine palestinienne, mais la version babylonienne, en repassant en Palestine, après la conquête arabe, supplanta les anciennes recensions palestiniennes, le Targum Yerushalmi ou Pseudo- Jonathan et le Codex Neofiti 1. Editions : Genizah Manuscripts of Palestinian Targum to the Pentateuch, (édition bilingue, avec traduction anglaise), by Michael L. Klein, 2 vol., Cincinnati 1986, Hebrew Union College Press. Etc.
11. A savoir : I Esdras, Tobie, Judith, Additions à Esther, Sagesse, Ecclésiastique de Ben Sira, Baruch, Epître de Jérémie, Additions à Daniel[/[i]i], Maccabées, Prière de Manassé ; grec in édition Brenton, précitée, supra, note 7 ; édition critique en anglais : The Apocrypha and Pseudepigrapha of the Old Testament in English, ed. by R.H. Charles, vol. I, Oxford University Press, repr. 1978.
12. Encyclopedia Judaïca, Jerusalem 1971, Keter Publishing House, art. « Pentateuch, Samaritan », vol. 13, c. 264 (c. 267).
13. C’est aussi l’opinion de plusieurs critiques modernes ; cf. sur ces critiques : James D. Purvis, The Samaritan Pentateuch and the Origin of the Samaritan Sect (1968), p. 74-78, p. 84-85 ; James Alan Montgomery, The Samaritans, the Earliest Jewish Sect (1968), p. 288. En ce sens aussi : The New English Bible, the Old Testament, Oxford & Cambridge University Press 1970, Intr., p. XI.
14. Encyclopaedia Judaïca, 1971, art. « Pentateuch, Samaritan », vol. 13, c. 267-268.
15. Cf. Samuel Kohn, Zur neuesten Litteratur über die Samaritaner in Zeitschrift der Deutschen Morgenländischen Gesellschaft, Bd. 39 (1885), p. 165-226, spéc. P. 186 ; idem, Die Samaritanische Pentateuchübersetzung nach der Ausgab von Petermann und Vollers, in Zeitschrift der Deutschen Morgenländischen Gesellschaft, Bd 47 (1893), p. 626-697, spec. P. 629.
16. Megilla, 1/9, Gémara, in Talmud de Jérusalem, éd. Schwab, t.IV, I, p. 212-213.
17. Menahem Mansoor, The Dead Sea Scrolls, Leiden 1964, Brill, p. 84-85 ; Encyclopaedia Judaïca, 1971, art. « Dead Sea Scrolls » vol. 5, C. 1399 (C. 1401 – 1402) ; André Dupont-Sommer, Les écrits esséniens découverts près de la mer Morte, Paris 1983, Payot, p. 18-20.
18. Cf. W.R. Tayler, A new Samaritan Inscription, in BASOR, n° 81 (1941), p. 1 (3).
19. Menahem Mansoor, The Dead Sea Scrolls (1964), p. 69 ss., p. 83-84.
20. Cf. James D. Purvis, The Samaritan Pentateuch and the Origin of the Samaritan Sect (1968), P. 72-73, 78 ; Encyclopaedia JudaÏca, 1971, art. « Bible », vol. 4, c. 835-836.

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Message  Freya Ven 4 Oct 2013 - 15:51

3e cycle : erreurs dues au manque de voyelles et de ponctuation

Le Texte Massorétique (la version hébraïque), à peine choisi comme autorisé, fut sujet à un troisième cycle d’erreurs. Le texte manquait de voyelles et ne comportait pas de ponctuation. Les lettres se succédaient selon le système de la scriptio continua, sans espace entre les mots ou entre les phrases. Les consonnes pouvaient être vocalisées différemment, en faisant du même mot, par exemple, un verbe ou un substantif. Une seule et même lettre pouvait être rattachée au mot qui la précède ou à celui qui la suit. Des variantes de lecture surgirent (21). Diverses écoles songèrent à ajouter des points-voyelles aux consonnes ; la plus importante est l’école des Rabbins de Tibériade aux Ve/Vie siècles de notre ère. Les mots furent prononcés, non conformément à leur phonétique originale, mais d’après la façon dont on lisait au Vie siècle. Des erreurs de copistes se glissèrent dans le texte : lettres doublées, manquantes, mal écrites ou confondues avec d’autres lettres. Ces erreurs s’ajoutèrent aux variantes du manque de ponctuation et du défaut d’espace entre les mots (22).

Les Rabbins réexaminèrent constamment, au cours des siècles, le Texte Massorétique et révisaient les lectures. Les exégètes judéo-arabes du Xe siècle, contemporains des massorètes, ainsi que les glossaires bibliques hébreux-vieux français, apportent souvent des traditions antérieures au Texte Massorétique (23). Les livres sacrés, à force de révision, finirent par ressembler aux dunes mouvantes dans la vallée des temps, poussées et repoussées par les vents des changements.

Le texte définitif, établi aux VIIIe/IXe siècles de notre ère, nous est parvenu chargé d’erreurs de toutes sortes : des originaux défectueux, des erreurs de copistes, des lettres substituées, des omissions et des additions, des déplacements de mots ou de phrases, et des tentatives désespérées de la part de copistes avisés pour remédier à la situation, tentatives qui aggravèrent les erreurs et approfondirent le mal.

En somme le texte de la Thora est passé par trois cycles d’erreurs : lors de sa transmission par voie orale dans la brume des siècles ; lors de sa rédaction et de sa compilation, depuis la Royauté vassale des Assyriens aux IXe/VIIIe siècles av. notre ère, et jusqu’à l’Exil babylonien et le retour en Judée sous la domination perse au Ive siècle av. notre ère ; enfin, après sa compilation au IVe siècle av. notre ère et jusqu’à la clôture de sa de sa rédaction finale au IXe siècle de notre ère, quelques vingt-deux siècles après Moïse ! (24)


21. Voir sur les variantes de lectures : Johannis Bern, De-Rossi, Variae Lectiones Veteris Testamenti Librorum, 4 vol., Amsterdam 1969-1970, Philo Pres.
22. Voir sur les erreurs de lecture et d’écriture : Friedrich Delitzsch, Die Lese-und Schreibfehler im Alten Testament, Berlin und Leipzig 1920, Veireinigung Wissenschaftlicher Verlager, De Gruyter, p. 2-148.
23. Voir pour une critique textuelle tenant compte des exégètes judéo-arabes et des glossaires bibliques hébreu-vieux français : Dominique Barthélemy, Critique textuelle de l’Ancien Testament, rapport final du Comité pour l’analyse textuelle de l’Ancien Testament hébreu, institué par l’Alliance Biblique Universelle, 5 vol., Fribourg, Göttingen 1982, Editions Universitaires et Vandenhoeck& Ruprecht (cf. vol. I, p. XIV-XV).
24. Les erreurs et interpolations du Texte massorétique sont reconnues par un bon nombre de critiques : R.H. Charles, The Book of the Jubilees, in the Apocrypha and Pseudepigrapha of the Old Testament in English, Oxford 1913, AT the Clarendon Press, repr. 1984, vol. II, p. 5 ; Adolphe Lods, Israël des origines au milieu du VIIIe siècle avant notre ère, 1930, La Renaissance du Livre, Paris 1969, Albin Michel, p. 17 ss. ; Idem, Les prophètes d’Israël et les débuts du judaïsme, 1935, La Renaissance du Livre, Paris 1969, Albin Michel, p. 18 s. ; Etc.

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Message  Freya Dim 20 Oct 2013 - 19:18

Imputation de la Thora à Moïse

L’imputation de la Thora à Moïse est une thèse insoutenable.
La version finale de la Thora s’est réalisée par un lent processus au fil des siècles, durant lesquels le noyau ancien était incessamment enrichi et complété. Ce processus rappelle celui de la formation des sagas des peuples européens ou de la littérature arabe préislamique.

Le texte de la Thora se fit avec le temps. La preuve en est que certaines sections de la Thora organisent une société postérieure à Moïse de plusieurs siècles. Moïse aurait vécu au XIIIe siècle avant notre ère, quand les Hébreux étaient encore des pasteurs nomades, se déplaçant avec leurs troupeaux d’un endroit à un autre, comme l’attestent les versets mêmes de la Thora (25). Alors que d’autres textes de la Thora présupposent une société sédentaire, au sein de laquelle les Hébreux vivaient dans les villes et cultivaient les champs (26), les prêtres et les Lévites jouissaient de grands privilèges (27), et le sacerdoce s’organisait en une hiérarchie ayant à sa tête un grand prêtre (28).

Parmi les additions subséquentes les plus importantes, tel que cela ressort du contenu social, figurent certaines parties du « Code de l’Alliance » (29) ; il comprend une codification complète, adaptée à une société grégaire et sédentaire. Ce Code fut imputé à Moïse, censé l’avoir reçu de Yahvé dans le désert du Sinaï, avant l’entrée des Hébreux dans les champs de Canaan.

Il en est de même pour diverses prescriptions : la construction de l’Arche de Yahvé, faites de bois d’acacia, plaquée d’or pur au-dedans et au-dehors ; le propitiatoire d’or pur orné de chérubins d’or repoussé, ayant des ailes déployées vers le haut, les faces tournées vers le propitiatoire ; les vêtements liturgiques des prêtes faits de pourpre violette et écarlate, de cramoisi et de fin lin retors, brochés de fils d’or, ornés de pierres de cornaline (30). Tout cela se révèle inaccessible à des pasteurs nomades qui se déplacent avec leurs tentes derrière les troupeaux, entre le désert du Sinaï et le désert du Néguev. Les Hébreux ignoraient au cours de plusieurs siècles, les arts décoratifs, jusqu’au point que Salomon, au Xe siècle av. notre ère, selon la version des livres sacrés, eut recours à des artisans phéniciens pour construire le temple de Jérusalem (31). Cela prouve que les prescriptions relatives à la construction de l’Arche et aux vêtements des prêtres remontent à une époque postérieure de plusieurs siècles à l’établissement en Canaan, après que les Béni Israël s’adonnèrent à l’agriculture et apprirent les arts décoratifs, et que le sacerdoce se transforma en un corps structuré, se souciant de ses apparences dans les rites cultuels, afin d’imposer son hégémonie et d’assurer ses privilèges.

De même les textes concernant les droits des filles à hériter de la terre cultivable (32), les villes de refuge où fuit le meurtrier par inadvertance (33), le prélèvement des prémices de tous les produits du sol (34), tout cela présuppose une société agraire où s’élèvent des villes, non des nomades vaguant avec leurs troupeaux dans les déserts, comme c’ était le cas au XIIIe siècle av. notre ère.

Bien plus ; le Lévitique établit un système économique, conformément auquel la terre appartient à Yahvé, mais est donnée aux cultivateurs en possession pour cinquante ans (35). Cela n’eut lieu qu’après le retour de l’Exil, lors de la théocratie exercée par les prêtres lévites, postérieurement à la chute de la maison royale de Juda, vers le Ve siècle av. notre ère.

Enfin, la dernière section de la Thora raconte avec maints détails le récit de la mort de Moïse et de son enterrement (36), et pourtant les textes déclarent que Moïse mit la Loi par écrit et la donna aux prêtres, fils de Lévi (37). Comment donc se fait-il que Moïse ait écrit de sa propre main le récit de sa mort et de son enterrement ?

L’imputation de la Thora à Moïse soulève des difficultés insurmontables ; aussi, a-t-elle été critiquée dès le Moyen Age (38). Il serait plus correct de dire que Moïse a été le premier législateur d’Israël (39). Son rapport à la Thora est minime, et se limite probablement au Décalogue, lequel est un résumé du ch. 125 du Livre des Morts des anciens Egyptiens. Personne d’autre que Moïse, ce prêtre égyptien, n’était mieux placé pour résumer la législation égyptienne (40). L’ensemble des législations subséquentes, des récits et sagas incorporés dans la Thora, remontent à la tradition et aux coutumes des Béni Israël. Aussi, la multitude des écrivains et des pédagogues israéliens sont d’avis que la Thora n’a pas été révélée par Dieu, dans le sens traditionnel du terme révélation, mais se montre le produit de la vie nationale d’Israël dans les temps anciens (41).



25. Nombres, 33/5-37, 41-49.
26. Cf. Deut., 22/23-27 : la peinez pour le cas de l’adultère dépend de l’endroit où il a été perpétré, danzs la ville ou à la campagne.
26. Supra, note 2105.
27. Lév., 21/10.
28. Exode, 20/22 à 23/3.
29. Exode, ch. 25 à 31, et 35 à 40.
30. I Rois, 5/20 ; 7/13 ; II Chr., 2/6, 12.
31. Nombres, 36/2.
32. Nombres, 35/9 ss.
33. Deut., 26/1-11.
34. Lév., ch. 25.
35. Deut., 34/4-8.
36. Deut., 31/9, 24-26.
37. Cf. H. Cazelles, art. "Pentateuque", in Suppl. Dict. Bible, t. VII (1966), c. 729-730. Et voir pour la critique de cette imputation à Moïse : Henri Cazelles, A propos du Pentateuque, in Biblica, vol. 35 (1854), p. 279 (291 ss.) ; Etc.
38. Encyclopaedia Judaïca, art. "Pentateuch", Jerusalem 1971 , Macmillan, vol. 13, c. 260.
39. Supra, notes 2124, 2372 ; et voir sur Moïse le prêtre égyptien : supra, note 1676.
40. Encyclopaedia Judaïca, art. "Torah", Jerusalem 1971, vol. 15, c. 1243.
41. Cf. E.M. Medvedev, Pamjatniki Srednevekovoj Indijskoj Literatury kak Istocnik po Istorii Social’no-Ekonomiceskih Ptnosenij  Ostnosenji v Feodal’no Indii, in Istoriografija, Stran Vostoka,  Mosk. 1969, Izd-vo Mosk. Univ., p. 152 ss.
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