L’auto-organisation des "structures dissipatives" selon Ilya Prigogine
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L’auto-organisation des "structures dissipatives" selon Ilya Prigogine
Ilya Prigogine a reçu le prix Nobel de chimie 1977, "pour ses contributions à la thermodynamique hors équilibre, particulièrement la théorie des structures dissipatives".
Les structures dissipatives décrivent le comportement des systèmes naturels ouverts, en interaction avec leur environnement, ce qui les distingue des systèmes expérimentaux ou technologique fermés, isolés de toute influence aléatoire.
La complexité des structures naturelles telles que les molécules organiques signifie de l’énergie potentielle. Celle-ci peut être libérée et transformée en travail par décomposition des molécules organiques complexes en molécules simples d’eau et CO2, comme cela se produit dans les moteurs à combustion ou en biologie par le catabolisme de substances nutritives. Il s’agit du processus thermodynamique appelé "production d’entropie".
Prigogine a démontré qu’en sens inverse, l’apport d’énergie peut augmenter la complexité du système en créant de l’énergie potentielle supplémentaire, dans le sens inverse de la production d’entropie. Il a découvert les conditions qui permettent aux systèmes naturels de produire de la complexité à l’inverse du principe thermodynamique de production d’entropie.
L’exemple des tourbillons de Bénard
Dans ses livres, Prigogine a expliqué le processus des structures dissipatives surtout sous la forme mathématique, probabiliste, de la thermodynamique et de la théorie du chaos. Mais dans Entre le temps et l'éternité (TE), il décrit la formation de structures par l'exemple plus intuitif des "tourbillons de Bénard":
Le milieu liquide est formé de molécules libres dont la mobilité augmente par réchauffement de bas en haut, créant un mouvement de convection. Le système devient instable et "sensible" à la gravité qui à l’état normal d’équilibre n’a pas d’effet. Sous l’influence de la gravité et de la forme du récipient se forment subitement, sur toute la surface, des cellules en nid d’abeille.
Les conditions de l'auto-organisation
Considéré du point de vue systémique, l'exemple des tourbillons de Bénard fait apparaître les conditions fondamentales de l'auto-organisation des systèmes naturels:
1 - Structure complexe
La structure est définie par "l'organisation des parties d'un système, qui lui donne sa cohérence." Sa cohérence est minimale dans un gaz dont les molécules sont considérées comme indépendantes. Elle est maximale dans le cristal où l'ordonnance des éléments est fixe. Entre les phases gazeuse et solide existe la phase liquide ou semi-liquide dont la mobilité est évaluée par les « degrés de liberté. »
2 - Énergie
La complexité des structures telles que les molécules organiques correspond à de l’énergie potentielle. Celle-ci peut être libérée et transformée en travail par dégradation des molécules organiques complexes en molécules simples d’eau et de CO2, comme cela se produit dans les moteurs à combustion ou en biologie par le catabolisme de substances nutritives. C’est le processus thermodynamique appelé production d’entropie.
Dans le sens inverse, l’apport d’énergie peut augmenter la complexité du système en créant de l’énergie potentielle supplémentaire, dans le sens inverse de la production d’entropie. Mais l’apport d’énergie seule ne suffit pas pour élever la complexité à un niveau supérieur. La création de structures complexes exige un apport d’énergie spécifique, cohérente, compatible avec le système et avec l’environnement.
En effet, il ne faut pas s'imaginer que n'importe quel apport d'énergie suffit pour faire émerger un ordre du chaos.
3 - Information.
La structure devenue instable atteint un point critique qui est appelé "bifurcation" en théorie du "chaos déterministe" parce que plusieurs solutions sont également probables. Elle devient alors "sensible" aux influences de l’environnement qui sont insignifiantes à l’état d’équilibre mais qui loin de l’équilibre font basculer le système dans un nouvel ordre stable.
Cependant Prigogine précise que dans la nature il ne s’agit pas d’interactions transitoires et aléatoires comme dans la théorie du chaos déterministe. Ce sont des interactions persistantes qui changent l’organisation complexe des structures.
L’induction d’un ordre est conditionnée par la confrontation de l’ordre propre de la structure avec un ordre externe dont l’influence persistante a le rôle d’information. Ces influences persistantes ont le rôle d’informations, elles induisent une forme, un ordre.
4 – Corrélation
Prigogine attribue la cohérence des tourbillons de Bénard à l’établissement de corrélation entre les molécules :
Il faut donc comprendre la "corrélation à longue portée" comme un processus global, non local et instantané qui coordonne simultanément toutes les parties.
Dans La fin des certitudes, Prigogine rappelle que Poincaré attribuait la corrélation de ces états aux résonances.
Les explications de l’auto-organisation, du mouvement et de la gravité que Yuri Ivanov donne dans Rythmodynamique permettent de comprendre la dynamique de l’univers du point de vue de la mécanique ondulatoire.
Conclusion
Les quatre conditions de l’auto-organisation - structure, énergie, informations et corrélation - correspondent par analogie aux causes classiques universelles d’Aristote : la cause matérielle, la cause efficiente, la cause formelle dont la corrélation est la cause finale
Les découvertes de Prigogine signifient donc un retour au bon sens des philosophies antiques. Leur importance paradigmatique en science est le retour au sens intuitif du temps, son irréversibilité, et au sens intuitif de l’espace, son unité et continuité.
Prigogine a aussi mis en évidence le rôle de la cohérence de l'ensemble sur le comportement individuel des parties. Il a éclairé la complémentarité de l'être et du devenir, de la partie et de l'ensemble, de la détermination et de l’indéterminé. Enfin, il a donné un sens à la matière comme système dynamique : "la matière à l’équilibre est aveugle et, dans les situations de non-équilibre, elle commence à voir". (FC 148-149)
Les structures dissipatives décrivent le comportement des systèmes naturels ouverts, en interaction avec leur environnement, ce qui les distingue des systèmes expérimentaux ou technologique fermés, isolés de toute influence aléatoire.
La complexité des structures naturelles telles que les molécules organiques signifie de l’énergie potentielle. Celle-ci peut être libérée et transformée en travail par décomposition des molécules organiques complexes en molécules simples d’eau et CO2, comme cela se produit dans les moteurs à combustion ou en biologie par le catabolisme de substances nutritives. Il s’agit du processus thermodynamique appelé "production d’entropie".
Prigogine a démontré qu’en sens inverse, l’apport d’énergie peut augmenter la complexité du système en créant de l’énergie potentielle supplémentaire, dans le sens inverse de la production d’entropie. Il a découvert les conditions qui permettent aux systèmes naturels de produire de la complexité à l’inverse du principe thermodynamique de production d’entropie.
L’exemple des tourbillons de Bénard
Dans ses livres, Prigogine a expliqué le processus des structures dissipatives surtout sous la forme mathématique, probabiliste, de la thermodynamique et de la théorie du chaos. Mais dans Entre le temps et l'éternité (TE), il décrit la formation de structures par l'exemple plus intuitif des "tourbillons de Bénard":
« Une mince couche liquide est soumise à une différence de température entre la surface inférieure, chauffée en permanence, et la surface supérieure, en contact avec l'environnement extérieur. Pour une valeur déterminée de la différence de température, le transport de chaleur par conduction, où la chaleur se transmet par collision entre molécules, se double d'un transport par convection, où les molécules elles-mêmes participent à un mouvement collectif. Se forment alors des tourbillons qui distribuent la couche liquide en "cellules" régulières. » (ET 52)
Le milieu liquide est formé de molécules libres dont la mobilité augmente par réchauffement de bas en haut, créant un mouvement de convection. Le système devient instable et "sensible" à la gravité qui à l’état normal d’équilibre n’a pas d’effet. Sous l’influence de la gravité et de la forme du récipient se forment subitement, sur toute la surface, des cellules en nid d’abeille.
Prigogine a écrit:Loin de l'équilibre, les processus irréversibles sont donc source de cohérence. L'apparition de cette activité cohérente de la matière - les structures dissipatives - nous impose un nouveau regard, une nouvelle manière de nous situer par rapport au système que nous définissons et manipulons. Alors qu'à l'équilibre et près de l'équilibre, le comportement du système est, pour des temps suffisamment longs, entièrement déterminé par les conditions aux limites, nous devrons désormais lui reconnaître une certaine autonomie qui permet de parler des structures loin de l'équilibre comme de phénomènes d'auto-organisation. (TE 59)
Les conditions de l'auto-organisation
Considéré du point de vue systémique, l'exemple des tourbillons de Bénard fait apparaître les conditions fondamentales de l'auto-organisation des systèmes naturels:
- une structure déjà complexe et flexible, dont les éléments ont une certaine mobilité définie comme "degré de liberté" (le liquide);
- un apport d'énergie cohérente, rendant le système instable et sensible à l'environnement (le chauffage);
- des influences de l’environnement organisant l’énergie, ayant le rôle d’information (gravité et forme du récipient);
- une "corrélation à longue portée" (cohérence des cellules en nid d’abeille).
1 - Structure complexe
La structure est définie par "l'organisation des parties d'un système, qui lui donne sa cohérence." Sa cohérence est minimale dans un gaz dont les molécules sont considérées comme indépendantes. Elle est maximale dans le cristal où l'ordonnance des éléments est fixe. Entre les phases gazeuse et solide existe la phase liquide ou semi-liquide dont la mobilité est évaluée par les « degrés de liberté. »
2 - Énergie
La complexité des structures telles que les molécules organiques correspond à de l’énergie potentielle. Celle-ci peut être libérée et transformée en travail par dégradation des molécules organiques complexes en molécules simples d’eau et de CO2, comme cela se produit dans les moteurs à combustion ou en biologie par le catabolisme de substances nutritives. C’est le processus thermodynamique appelé production d’entropie.
Dans le sens inverse, l’apport d’énergie peut augmenter la complexité du système en créant de l’énergie potentielle supplémentaire, dans le sens inverse de la production d’entropie. Mais l’apport d’énergie seule ne suffit pas pour élever la complexité à un niveau supérieur. La création de structures complexes exige un apport d’énergie spécifique, cohérente, compatible avec le système et avec l’environnement.
En effet, il ne faut pas s'imaginer que n'importe quel apport d'énergie suffit pour faire émerger un ordre du chaos.
3 - Information.
La structure devenue instable atteint un point critique qui est appelé "bifurcation" en théorie du "chaos déterministe" parce que plusieurs solutions sont également probables. Elle devient alors "sensible" aux influences de l’environnement qui sont insignifiantes à l’état d’équilibre mais qui loin de l’équilibre font basculer le système dans un nouvel ordre stable.
Cependant Prigogine précise que dans la nature il ne s’agit pas d’interactions transitoires et aléatoires comme dans la théorie du chaos déterministe. Ce sont des interactions persistantes qui changent l’organisation complexe des structures.
L’induction d’un ordre est conditionnée par la confrontation de l’ordre propre de la structure avec un ordre externe dont l’influence persistante a le rôle d’information. Ces influences persistantes ont le rôle d’informations, elles induisent une forme, un ordre.
4 – Corrélation
Prigogine attribue la cohérence des tourbillons de Bénard à l’établissement de corrélation entre les molécules :
Prigogine explique que « les nouveaux états de non-équilibre de la matière se caractérisent par l’apparition de corrélations à longue portée » et que « les corrélations permettent de préciser la relation entre "tout" et "parties".« Loin de l'équilibre, c'est véritablement de nouveaux états de la matière qu'il convient de parler, d'états qui s'opposent à l'ensemble des états d'équilibre. […] Les nouveaux états de non-équilibre de la matière se caractérisent par l'apparition de corrélations à longue portée. » (TE 52/53)
Il faut donc comprendre la "corrélation à longue portée" comme un processus global, non local et instantané qui coordonne simultanément toutes les parties.
Dans La fin des certitudes, Prigogine rappelle que Poincaré attribuait la corrélation de ces états aux résonances.
Les termes de corrélation, "non-locale" ou "à longue portée" évoquent l’intrication quantique. Alors que la mécanique quantique n’offre pas d’explication pour cette cohérence, la mécanique ondulatoire de L. de Broglie et plus précisément la mécanique des ondes stationnaires avec leur onde de phase permet de comprendre la cohérence comme "harmonie des phases."« Il a introduit la notion cruciale de "système dynamique non intégrable". Il a montré que la plupart des systèmes dynamiques étaient non intégrables. » (FC 44)
« […] il a identifié la raison du caractère exceptionnel de cette propriété: l'existence de résonance entre les degrés de liberté du système. Il a, ce faisant, identifié le problème à partir duquel une formulation élargie de la dynamique devient possible.»
Le même phénomène se produit en musique, lorsque nous jouons une note sur un instrument. Nous entendons les harmoniques. La résonance "couple" les sons.
Les fréquences, et en particulier la question de leur résonance, sont au cœur de la description des systèmes dynamiques. Chacun des degrés de liberté d'un système dynamique est caractérisé par une fréquence. (FC 44-45)
Les explications de l’auto-organisation, du mouvement et de la gravité que Yuri Ivanov donne dans Rythmodynamique permettent de comprendre la dynamique de l’univers du point de vue de la mécanique ondulatoire.
Conclusion
Les quatre conditions de l’auto-organisation - structure, énergie, informations et corrélation - correspondent par analogie aux causes classiques universelles d’Aristote : la cause matérielle, la cause efficiente, la cause formelle dont la corrélation est la cause finale
Les découvertes de Prigogine signifient donc un retour au bon sens des philosophies antiques. Leur importance paradigmatique en science est le retour au sens intuitif du temps, son irréversibilité, et au sens intuitif de l’espace, son unité et continuité.
Prigogine a aussi mis en évidence le rôle de la cohérence de l'ensemble sur le comportement individuel des parties. Il a éclairé la complémentarité de l'être et du devenir, de la partie et de l'ensemble, de la détermination et de l’indéterminé. Enfin, il a donné un sens à la matière comme système dynamique : "la matière à l’équilibre est aveugle et, dans les situations de non-équilibre, elle commence à voir". (FC 148-149)
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