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[Fiche de lecture] Les Trois yeux de la connaissance - Ken Wilber

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Message  SFuchs Mer 18 Jan 2017 - 17:33

Les Trois yeux de la connaissance de Ken Wilber s'apparente à une thèse universitaire supérieure, dans laquelle Ken Wilber propose des pistes pour la définition d'une science intégrale couvrant les trois niveaux de la réalité que sont schématiquement : le matériel, le mental-raison, le spirituel.

A l'appui de sa thèse, Ken Wilber analyse avec beaucoup de nuances les confusions consécutives à l'emploi erroné du point de vue d'un niveau de réalité pour un autre.

- Il porte cette analyse sur les rapports entretenus entre les sciences physiques, la philosophie et la religion.

- Il porte également cette analyse sur les confusions entretenues dans les théories psychanalytiques entre, notamment, la monde prérationnel de la personne et la réalité transrationnelle vers laquelle il est amené à s'élever.

- Il éclaircit en passant les théories holographiques de l'univers, en démêlant les notions de hiérarchie, d'holographie et d'agencement fractal. Il se montre sceptique sur les théories holographiques-intégrales de l'univers.

- Ken Wilber utilise sa thèse pour proposer une évaluation de la qualité de quelques mouvements spirituels nés avec la grande vague new-age, considérant que dans ce domaine, le pire côtoie le prometteur.

- L'avant-dernière partie revient en détail sur les phases de développement et d'éveil de la personne.

- La dernière partie consiste en une longue réflexion autour de la question de l'Absolu et de l'Un.

Le travail de Ken Wilber est d'une telle densité que chacun des ces points de vue, lorsqu'abordés, le seront de façon bien plus superficielle que dans l'ouvrage, par ailleurs ils seront reformulés un peu librement pour intégrer des éléments de réflexion personnels.

A suivre...
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Message  SFuchs Ven 20 Jan 2017 - 18:23

Ken Wilber s'appuie sur la définition des trois yeux de Saint Bonaventure, pour définir plusieurs niveaux de réalité et plusieurs niveaux de connaissance. Les trois niveaux posés sont

- corps/matière
- mental
- esprit

Alors que dans l'Antiquité, les Grecs avaient su développer - non pas une science de l'observation au sens moderne - mais un art de l'observation, Ken Wilber note qu'il en fut tout autrement durant la période du Moyen-Age européen. Plutôt que de s'en tenir à la pratique mystique de l’Antiquité tardive - à l'image des premiers chrétiens que l'histoire retient sous la dénomination de "Pères du désert" -, la nouvelle institution catholique eu pour prétention d'expliquer et de cerner tous les aspects et compartiments de la connaissance, des questions spirituelles aux questions matérielles, en passant par l'ensemble de la philosophie via la scolastique et l'élaboration des normes avec le Droit canon.

Il faut donc considérer la Renaissance comme une forme de révolte contre cette emprise totale de l'église sur l'ensemble des questions ayant trait à la connaissance. Les premiers pas de la science se fondent sur un anti-idéalisme et une forme d'anti-rationalisme, en réaction aux conclusions absurdes sur la réalité du monde déduites par pure spéculation, sans considération pour des données objectives tirées de l'observation, à partir desquelles initier le raisonnement, pour ensuite confronter ses conclusions à l'expérience probante ou invalidante.

En agissant de la sorte, les fondateurs de la science moderne tels que Galilée ou Kepler ont non seulement levé le voile sur une compréhension plus juste des lois physiques et de la nature, mais ont rendu service, sur le long terme, à la religion elle-même, invitée à se recentrer sur sa véritable vocation : ouvrir l'âme à la contemplation et l'expérience divine, plutôt que de se décrédibiliser durablement en assénant des contre-vérités ou des absurdités à propos de questions sur lesquelles elle est quasiment aveugle.

On pensera notamment, à ce sujet, à l'expérience fondatrice de Galilée au sujet de la chute des corps, montrant que la vitesse de chute est indépendante de la masse (1 kg de cuivre tombe aussi vite que 100 kg de plomb, seul la hauteur de chute influence leur vitesse, ils rentrent en impact avec le sol en même temps). Une expérience que l'on peut juger triviale avec notre regard moderne, mais dont la mise en oeuvre n'était même pas envisagée tant elle aurait pu paraître incongrue dans le contexte des idées de l'époque.

Si la remise en question de l'omniscience tirée d'une vision idéaliste du monde peut être considéré comme salutaire pour les sciences relatives aux idées (philosophie et métaphysique) et à l'esprit (la gnose, la contemplation, la méditation) ; un certain acharnement à vouloir défendre la position contraire a, semble-t-il, largement décrédibilisé l'utilité des religions aux yeux d'un public toujours plus grand. A raison au regard de l'attachement absurde a des théories condamnées à l'obsolescence comme le géocentrisme, mais à tort au regard des questions spirituelles en tant que telles. Et d'ailleurs, de la même façon que l'église a souhaité maintenir une grille de lecture exclusivement métaphysique pour tout expliquer des phénomènes à quelque niveau, les rationalistes et les empiristes leur ont emboîté le pas en cherchant à imposer le seul niveau de la raison ou de l'expérience pour expliquer les phénomènes des autres niveaux. Cette revanche des empiristes et des rationalistes explique, aujourd'hui encore, le paradigme scientiste dominant selon lequel "tout ce qui ne peut être mesuré ou observé n'existe pas".

Nous allons donc expliciter, à l'aide du schéma simple de Ken Wilber, chaque niveau de réalité et chaque modalité correspondante d'accès à la connaissance de ce niveau. Nous tâcherons également de définir et d'expliciter de façon exhaustive les confusions liées à l'usage d'un niveau de la réalité ou de la connaissance pour étudier un niveau qui lui est différent.

A suivre...
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Message  SFuchs Lun 23 Jan 2017 - 15:46

Voici donc les niveaux de réalité et de connaissance identifiés par Ken Wilber :

[Fiche de lecture] Les Trois yeux de la connaissance - Ken Wilber Wilber_01

* Lorsqu'un niveau entre en relation avec un autre niveau, on peut à la fois parler d'expérience ou de connaissance directe :

Au niveau 1 corps/matière (5 sur le schéma) :

L'expérience ou connaissance directe peut être considérée comme l'interaction physique, ou encore dans le cas biologique de l'expérience sensori-motrice. Lors des premiers âges de l'enfant, celui-ci n'a aucun recul sur son corps ou sur les impressions de plaisir ou de douleur qui parviennent à son moi. Toute expérience personnelle se réduit à l'expérience sensori-motrice, l'enfant fait "un" avec le plaisir, la douleur, son environnement ; sans possibilité de médiation par la conscience mentale qui advient plus tard.


Au niveau 2 mental (3 sur le schéma) :

L'expérience peut être considérée comme l'intersubjectivité, soit l'aptitude d'un moi conscient à expérimenter un autre moi conscient.
Par ailleurs, le niveau 2 peut faire l'objet, en plus d'une connaissance directe par l'expérience intersubjective, d'une connaissance intellectuelle lorsque le sujet qui étudie considère le sujet étudié comme un objet, rompant la symétrie spontanée et naturelle de la relation intersubjective naturelle et directe. C'est cette attitude que cherche par exemple à adopter le psychanalyste face à son patient. La connaissance intellectuelle placant le sujet face à son objet d'étude sur le même niveau s'appelle la psychanalyse lorsque l'objet d'étude est un autre individu, mais aussi l'herméneutique ou la sémiologie lorsqu'il s'agit d'étudier le sens des images et symboles présents dans le mental des hommes et produits pas lui.


Au niveau 3 spirituel (1 sur le schéma) :

la connaissance directe est connue sous le nom de gnose, et l'expérience spirituelle sous les appellations d'illumination, d'extase ou de communion spirituelle. Il n'existe pas à proprement parler de rapport écrit ou livresque pouvant rendre compte de ce type de connaissance, qui se transmet par l'initiation, l'élévation du moi au dessus du mental, et relève ensuite de l'expérience personnelle et individuelle (même si les personnes essayant d'expliciter par des mots ce qu'ils ont vécu recourent de façon récurrente aux mêmes images et formules).


* Lorsque le mental, à mi-chemin sur les trois niveaux de réalité, se propose d'étudier les autres niveaux de réalité, nous pouvons établir avec Ken Wilber l'inventaire suivant :


Du mental au physico-corporel (4 sur le schéma) :

La science empirico-analytique, qui se donne pour objet de comprendre et connaitre les lois de la physique et du règne biologique en général (jusqu'au corps humain inclus). La science empirico-analytique est précisément la démarche et la méthode avec laquelle, comme évoqué plus haut, les fondateurs de la science moderne ont contesté à juste titre la prétention du mental à tout expliquer du monde physique sans ne jamais avoir recours à l'observation et la mesure directe pour collecter des données ou valider leurs spéculations.


Du mental au mental/raison (3 sur le schéma, déjà évoqué) :

Comme nous l'avons déjà évoqué, les sciences se situant sur ce niveau sont les sciences humaines, la psychanalyse, l'herméneutique, la sociologie. Quant aux sciences cognitives et aux théories behavioristes, elles ne se situent pas tout à fait sur ce niveau, nous en reparerlons plus loin.


Du mental au spirituel (2 sur le schéma) :

Ken Wilber regroupe cette science sous le terme de Science Mandala. En effet, il s'agit pour la raison de se représenter une réalité qui, par définition dépasse la raison. La solution pour y parvenir - pour autant que cela soit possible -, consiste à recourir à la représentation symbolique. Le Mandala fait partie de ces représentations symboliques, et il en existe d'autres : la Croix, le Triskèle, la Spirale originelle, le Totem, les Runes, l'Hexagramme taoïste etc.
S'il s'agit d'approcher l'esprit avec des formules et des mots, la formule paradoxale semble être le meilleur recours. En effet, la raison catégorise, et ne peut donc exprimer en plénitude une réalité au delà des catégories et des distinctions. C'est à la formule paradoxale que les grands mystiques ont recouru pour parler de ce dont on ne peut cerner avec des mots. Ce fut le cas de Lao Tseu, de Nicolas de Cues, des grands mystiques bouddhistes, des grands yogis, de Bouddha lui-même... et de toute personne inspirée ayant connu ou approché la connaissance directe lors d'une expérience d'éveil ou d'illumination : Kierkegaard, Simone Weill, Descartes, Jakon Böhme, Maître Eckhart... et certainement Ken Wilber ou encore Fritjof Capra.

[Fiche de lecture] Les Trois yeux de la connaissance - Ken Wilber Mandala_tibetain_01
Mandala tibétain

Après avoir fait un inventaire des niveaux de réalité et de connaissance qui peuvent leur être associés, nous allons étudier - si possible de façon exhaustive - les glissements épistémologiques (comme les spéculations sans fondement réel sur leur objet d'étude) et les réductionismes divers (comme par exemple le scientisme que nous avons déjà évoqué) ; comme étant les conséquences d'une confusion dans l'attribution d'un niveau de réalité ou de point de vue à un niveau qui n'est pas le sien.

A suivre...
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Message  SFuchs Mar 24 Jan 2017 - 14:43

Les confusions et glissements identifiables dans les différentes théories et connaissances sur la base du modèle de Ken Wilber :

- La science empirique et le réductionnisme associé : le scientisme

Ken Wilber est assez prolixe sur le sujet, et comme nous l'avons déjà évoqué, nous nous contenterons d'un résumé synthétique. Ainsi, lorsque l'approche empirico-analytique (scientifique classique) a raison d'affirmer que :
"La preuve empirique est la meilleure méthode pour obtenir des faits dans le domaine sensoriel"

elle se décrédibilise et désert sa cause en allant jusqu'à affirmer que :

"Seules les propositions susceptibles d'être vérifiées de façon empirique sont vraies."

Les espoirs - que l'on devine excessifs - placés dans les sciences cognitives sont assez emblématiques de cette approche lorsque, par exemple, des crédits de recherche importants sont alloués à l'étude du fonctionnement biochimique et électrique du cerveau humain, avec la promesse bankable aux yeux de l'opinion publique que les progrès dans ce domaine nous feront percer les secrets de la pensée humaine ou de la méditation des yogis.

- Les sciences humaines et leur réductionnisme associé : le sociologisme

Les chercheurs en sciences humaines ont raison de considérer que :

"l'étude des sociétés humaines et des hommes en société est une bonne méthode pour mieux comprendre les enjeux spécifiquement humains qu'il faut considérer pour organiser la vie collective et individuelle de façon plus harmonieuse"

en revanche ils se décrédibilisent et desservent leur cause en allant jusqu'à supposer que :

"la vie des hommes est exclusivement réglée - ou devrait l'être - par des lois produites par les hommes à la lumière de leur raison"

Ce sociologisme-là est bien connu de ceux qui se sont penchés sur la question sociale, mais reste largement dans le domaine du non-dit et du tabou, alors que nous sommes déjà largement revenus du scientisme dont il faut dater l'apogée au XIXème siècle.
=>Ainsi, le réductionnisme sociologique (le sociologisme) aboutit aux différentes théories du gender : les gender studies dont on nous dit qu'il s'agit d'études plus que de théories abouties, mais dont les directions de recherche et le contenu sont orientés par des personnes largement partisanes, et qui souhaitent faire correspondre leurs observations à leurs idées préétablies (répondant en cela parfaitement au qualificatif d'idéologues).
=> Le réductionnisme sociologique (le sociologisme) aboutit également à une relativisation complète de tous les systèmes de croyances et de toutes les religions, en réduisant celles-ci au seul "fait religieux", soit une façon de concevoir la vie en société en fonction de croyances relevant du folklore ou de l'opinion, plutôt que se rattachant à une perception particulière du spirituel et du divin. Ce réductionnisme induit l'idée qu'en modifiant des croyances relevant de la simple impression, de l'opinion, d'un contexte culturel, ou plus prosaïquement de la croyance au Père Noël ou à la petite souris verte ; il sera possible d'établir une société pacifiée et homogénéisée d'individus réglant leur vie sur les seuls principes et règles de raison.
=> Ce réductionnisme est à rapprocher de la dérive homothéiste que nous évoquerons plus loin.

- La vision idéaliste et ses dérive spéculatives associées, à l'égard de la nature et/ou de la vie des hommes

Nous avons déjà évoqué la révolte salutaire des fondateurs de la science physique moderne tels que Galilée ou Kepler coupant court, à l'aide d'une méthodologie systématique d'observation, de quantification et de mesure ; à toutes les déductions absurdes relatives aux lois de la Nature, dont le géocentrisme est un exemple historique des plus emblématiques.
Nous pouvons également évoquer la dérive similaire appliquée à la société des hommes, lorsqu'il s'agit de déduire l'éthique appliquée aux hommes sur la seule base de considérations idéalistes.

Ainsi, la vision idéaliste a raison de considérer que :

"Les lois des niveaux de réalité supérieurs se reflètent, ou marquent de leur empreinte, les lois des niveaux qui se situent en dessous dans la hiérarchie de la réalité et de la connaissance"
et sa proposition corollaire
"On est en droit de douter de la qualité d'une théorie ou d'une connaissance lorsqu'elle viole manifestement des principes de la réalité qui lui sont supérieurs"

en revanche la vision idéaliste conduit à des confusions ou à une compréhension vague et floue des phénomènes lorsqu'elle va jusqu'à considérer que :

"Les lois de la nature sont déductibles par la seule spéculation"
ou encore que
"les lois qui régissent les hommes se déduisent des lois qui régissent le Ciel".

Concernant la dernière formulation, elle fut l'objet de querelles philosophiques et éthiques dans la Chine des premiers siècles, entre d'une part les taoïstes radicaux (comme par exemple Tchouang Tseu) apportant peu de crédit à la vie en société des hommes et donc à l'étude de celle-ci, et les confucianistes plus pragmatiques, mais parfois en opposition mimétique avec ceux qui portaient un jugement moqueur sur leur quête d'une "Voie du milieu" consistant à vouloir concilier cosmogonie et éthique appliquée (comme par exemple Confucius).

- L'attribution à la Nature des lois du niveau de la conscience humaine : la pensée magique

Ken Wilber ne parle pas explicitement de cette dérive, néanmoins on peut la rajouter dans l'inventaire. On peut considérer que la pensée magique consiste à attribuer à la Nature des modes de fonctionnement de la conscience qui sont propres à la conscience humaine. C'est une anthropologisation de la Nature.

- La réduction de l'Esprit au niveau de la conscience humaine : l'homothéisme

De la même façon, la dérive homothéiste consiste à réduire le niveau de l'esprit à celui de l'homme, en ne concevant pas la différence de nature entre l'homme et le divin. C'est une anthropologisation de l'Esprit.

Dans une prochaine partie, nous étudierons spécifiquement la confusion de niveau sur laquelle Ken Wilber insiste le plus dans son ouvrage : il s'agit de la confusion entre les deux niveaux que sont l'esprit et le physico-corporel, qui ont ceci en commun qu'ils ne se situent pas au niveau du mental ; celui-ci peut donc assez facilement confondre les manifestations issues de l'un de ces niveaux avec les manifestations de l'autre. Il s'agit de la confusion Pre/Trans (CPT), ayant une grande incidence sur la compréhension de l'âme humaine et plus généralement sur les représentations cosmogoniques.

A suivre...


Dernière édition par SFuchs le Mer 25 Jan 2017 - 16:09, édité 1 fois
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Message  SFuchs Mer 25 Jan 2017 - 16:06

En tant que niveaux non rationnels, non conscients, ou non personnels ; les niveaux physico-corporels prérationnels, préconscients ou prépersonnels sont régulièrement confondus avec les niveaux spirituels transrationnels, transconscients ou transpersonnels. Nous allons illustrer cette confusion dans plusieurs approches religieuses, psychanalytiques ou sociologiques, et les effets pervers induits par cette confusion.

- Le mythe religieux de la Chute :

Dans la version judéo-chrétienne de la Chute, le péché de l'homme est associé à sa volonté d'accéder à la connaissance, fruit de l'arbre proscrit par Dieu. L'homme est chassé du jardin d'Eden en même temps qu'il accède à la conscience et prétend accéder à la connaissance. Cette compréhension de la Chute fait porter la faute de la présence du Mal dans le monde sur les seules épaules de l'homme, en tant qu'être s'étant affranchi de l'omnipotence de Dieu par la désobéissance et l'accès au libre arbitre.
Ken Wilber voit là une confusion Pré/Trans manifeste, dans le sens où la condition de l'homme dans son état de nature préconscient est associé à un Paradis perdu, un âge d'ôr duquel l'homme s'est éloigné, et vers lequel il a vocation à retourner. Or la nature, loin d'être un état de plénitude, constitue plus un état d'imperfection inconsciente que de perfection consciente. En tant que créature à mi-chemin du parcours reliant la Nature - cette imperfection inconsciente -, à l'Esprit - cette perfection consciente - l'homme est en situation d'imperfection consciente, et souffre à double titre de ses imperfections héritées de l'état de nature qui l'a précédé, en même temps qu'il souffre du sentiment conscient d'incomplétude. Si donc l'homme devait avoir un quelconque sentiment de culpabilité, ce n'est pas, selon une certaine interprétation des textes bibliques (qui n'est pas exclusive mais constitue une dérive dogmatique manifeste), vis-à-vis de sa condition de "pécheur" dont il n'a fait qu'hériter, mais plutôt des choix conscients qu'il fait - ou ne fait pas - pour élever sa conscience vers l'esprit.


- Jungiens et Freudiens : Ken Wilber estime que Jungiens et Freudiens, se basant sur les travaux des fondateurs idoines, sont induits en erreur par deux confusions Pré/Trans contenues dans leurs théories.

Dans le cas des jungiens, ceux-ci utilisent souvent la notion d'archétypes, sans qu'il soit clair si ces images répondent à une réalité prépersonnelle ou transpersonnelle (il semblerait que Jung n'ait pas explicitement tranché sur ce sujet). Ainsi, Jung n'est pas assez explicite pour distinguer les images archaïques des images archétypes. Les images archaïques seraient la mémoire cumulative de l'évolution de l'espèce humaine depuis son état le plus proche de l'état naturel jusque son état de développement historique actuel ; tandis que les archétypes seraient des imago dei, les symboles que la conscience émet pour essayer de se représenter le divin. S'il existe dans l'histoire et les cultures des représentations symboliques amalgamant les deux niveaux dans leurs arts respectifs, il n'en reste pas moins qu'il s'agit de deux niveaux de réalités distincts, et que cette distinction constitue une réelle avancée dans la connaissance et la définition d'une science intégrale.

Dans le cas des freudiens, toute expérience spirituelle ou mystique est considérée comme une manifestation névrotique issue de l'insconscient, c'est-à-dire de la réalité préconsciente de la personne. Le niveau spirituel et les expériences qui peuvent lui être associées est réduit au niveau corporel et à ses troubles. Comme le note avec humour Ken Wilber, du point de vue de Freud "le Christ souffrait d'hallucinations, Lao-Tseu était psychotique, Bouddha était schizophrène, ainsi d'ailleurs que Platon, Hegel, Aurobindo, etc."


- Organisation sociale : décadentisme et anti-spiritualisme

Par décadentisme, nous entendons une vision du monde selon laquelle tout éloignement de l'homme de son état de nature, synonyme d'âge d'or, est une mauvaise chose en soi. Nous avons déjà évoqué certaines interprétations du thème de la Chute spécifiquement traité par les textes bibliques. Nous pouvons également mentionner le mythe du bon sauvage de Rousseau, ou encore les thèses pessimistes d'un Lévi Strauss basées sur une interprétation incomplète et partielle des théories entropiques conduisant invariablement le cosmos à la mort thermique. L'apparition de la conscience humaine ne ferait, dans cette optique, qu'accélérer la venue de l'échéance par sa capacité démultipliée à inventer et transformer. De ce point de vue, la création humaine apparaît comme un fléau de plus dans l'histoire cosmique. Nous pouvons également citer ces idées dans l'air du temps, selon lesquelles la politesse serait en vérité une forme d'hypocrisie, ou bien encore que la spontanéité serait toujours meilleure et préférable à la retenue.

Anti-spiritualisme : Etant donné la grande confusion régnant autour des différents mouvements mystico-spirituels, l'ensemble de ces mouvements est amalgamé au narcissisme de masse propre à notre époque capitalisto-libérale. S'il est vrai que certains mouvements spirituels confondent le dépassement du moi avec sa régression au niveau prépersonnel (dérives sectaires apocalyptiques, sacrificielles, tribales, orgiaques en tout genre) et que ces dérives sont cohérentes avec les messages publicitaires régressifs de la société actuelle de consommation de masse et de marché, il n'en demeure pas moins que certains mouvements sont basés sur des pratiques débouchant sur un réel éveil de la personne (pensons par exemple aux pratiques méditatives et énergétiques basées sur des traditions orientales comme le Qi Gong).

Dans la prochaine partie, nous commencerons par exposer la cosmogonie de Ken Wilber, qu'il explicite clairement en milieu d'ouvrage. Elle nous permettra de mettre en lumière les a priori de Ken Wilber sur lesquels il fonde les analyses qui ont précédé, en même temps que nous pourrons enchaîner sur sa théorie de l'évolution/involution, ainsi que sur les phases et enjeux de l'éveil ou "ascension du moi".

A suivre...
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[Fiche de lecture] Les Trois yeux de la connaissance - Ken Wilber Empty Re: [Fiche de lecture] Les Trois yeux de la connaissance - Ken Wilber

Message  SFuchs Dim 29 Jan 2017 - 13:16


Ken Wilber nous livre en milieu d'ouvrage une cosmogonie qu'il retient comme dénominateur commun de plusieurs traditions, et donc illustratrice de ce qu'il appelle la philosophie éternelle.



Au "commencement" il n'y a que la Conscience en tant que telle, intemporelle, infinie et éternelle. Une ondulation est née dans cet océan infini, sans qu'on puisse en expliquer la raison par des mots. D'elle-même, elle ne pourrait se soustraire à l'infini, car celui-ci englobe toutes les entités. Cependant, cette ondulation subtile, s'éveillant à elle-même, oublie la mer infinie dont elle n'est qu'une expression. Elle se croit par conséquent séparée de l'infini, isolée, distincte.
Cette ondulation, très raréfiée est la région causale (niveau -5), le début même — aussi faible soit-il — de la vague de l'ipséité. A ce stade, elle est toujours très subtile, toujours « proche » de l'infini, toujours extatique.
Mais d'une certaine manière, elle n'est pas vraiment satisfaite, pas profondément paisible. Pour trouver cette paix ultime, l'ondulation devrait en effet retourner à l'océan, se dissoudre à nouveau dans l'infini radieux, s'oublier et se remémorer l'absolu. Pour ce faire, elle devrait mourir — elle devrait accepter la mort de son sentiment d'identité distinct. Or, cela la terrifie.
L'infini est tout ce à quoi elle aspire, mais l'épouvante qu'elle éprouve à l'idée de la mort nécessaire l'amène à rechercher l'infini par des moyens qui l'empêchent de le trouver. L'ondulation veut la libération et en même temps elle en a peur, elle arrange donc un compromis et un substitut. Au lieu de trouver la vraie Divinité, l'ondulation prétend être Dieu, cosmocentrique, héroïque, suffisante, immortelle. Non seulement c'est le commencement du narcissisme et de la bataille de la vie contre la mort, mais encore c'est une version réduite ou restreinte de la conscience, parce que l'ondulation ne fait plus un avec l'océan, elle essaie d'être elle-même l'océan.
Mue par ce projet Atman — la tentative pour atteindre l'infini par des moyens qui l'empêchent d'y parvenir, et qui lui imposent des gratifications de substitution — l'ondulation crée des modes de conscience toujours plus étroits, toujours plus restreints. Jugeant que le causal est moins que parfait, elle réduit la conscience pour créer le subtil (niveau -4). Trouvant en définitive, que le subtil n'est pas idéal, elle réduit une fois encore la conscience pour créer le mental (-3). Se heurtant à un nouvel échec, elle la réduit au plan pranique, puis au plan matériel, où, son désir d'être dieu s'épuisant, elle sombre dans un sommeil insensible.
[...]
L'objectif ultime de l'évolution — le mouvement de l'inférieur vers le supérieur — consiste à s'éveiller en tant qu'Atman, et donc à retenir la gloire de la création sans être forcé d'interpréter le drame de la souffrance du moi.

Nous retrouvons ces grands principes dans l'hindouisme comme dans la Kabbale avec la théorie de l'arbre-éclair des Sephiroth, ainsi qu'indirectement et de façon imagée dans la Genèse biblique. Nicolas de Cues a également des intuitions similaires (Unitas/Alteritas/Medius), que l'on peut qualifier de néoplatoniciennes (bien qu'il fut un théologien catholique). Et d'ailleurs Saint Bonaventure, théoricien des trois yeux de la connaissance, est proche de Nicolas de Cues à ce titre.

Cette cosmogonie nous permet de mettre en évidence les notions d'involution et d'évolution, utilisées par Ken Wilber pour expliciter les enjeux de l'éveil spirituel.

Ken Wilber distingue, dans la vie et l'activité du moi, les mouvements verticaux de celui-ci (évolution ou involution) des mouvements horizontaux qu'il appelle des translations, qu'il définit avec beaucoup de pertinence - et indépendamment du contenu à proprement parler de cette activité - comme "des dérivés tangentiels de facteurs de transformation (c'est-à-dire comme des compromis de pulsions évolutives et involutives)".

[Fiche de lecture] Les Trois yeux de la connaissance - Ken Wilber Wilber_02

Quant au moi, il est comme un système, un ensemble de fonctions visant à observer le respect d'un ensemble de principes garants de la vie. Parmi ces grands principes : le principe d'intégrité, de persistance, d'adaptation notamment. Le soucis de respecter ces grands principes constitue le contenu de cette activité du moi. Le stade de développement spirituel de l'individu reflète le niveau de développement sur lequel le moi s'est attaché (moi pléromatique pré-natal lors de la gestation, moi corporel post-natal, moi syntaxique lors de l'acquisition du langage, moi symbolique lors de l'acquisition du culturel et du contextuel etc.)

L'activité horizontale du moi peut être définie par la dichotomie préservation/altération. La préservation consiste à consolider la structure sur laquelle le moi s'est établi. L'altération répond à un principe d'activité nécessaire au réajustement permanent et à l'adaptation à un environnement en perpétuel changement. La dichotomie préservation/altération constitue une dialectique dont l'un des enjeux est la pérennisation, et l'autre enjeu l'évolution. A ce titre, il faut distinguer deux types de vies et deux types de mort.

La vie dans son versant positif consiste à vouloir prolonger l'existence et est indissociable d'une aspiration et d'un élan de la personne vers un retour à l'Unitas (principe évolutif).
La vie dans son versant négatif consiste en un attachement excessif à son identité et au poids excessif de l'instinct de préservation dans la dichotomie préservation/altération. C'est envers cet attachement excessif que les bouddhistes nous mettent en garde lorsqu'ils nous parlent du passage obligé par la mort de l'ego, pour renaître sur des niveaux de conscience supérieurs. S'élever à la vie et à des niveaux supérieurs plus saturés d'Etre a pour corollaire la mort et le deuil de l'ego à ce qui l'attache de façon excessive à son état de développement présent.
De la même façon, il existe un versant positif et un versant négatif à la mort. Il ne faut donc pas confondre le deuil nécessaire - une sorte de petite mort - à faire de la part de l'ego pour évoluer vers des niveaux de conscience plus élevés, avec la Mort avec un "M" majuscule, c'est-à-dire un anéantissement ou encore une régression vers la plus complète Alteritas (involution).

Digression : les enjeux de l'initiation et de l'éducation

Ken Wilber développe une analyse exhaustive de ces enjeux, nous nous contenterons d'un très rapide résumé.
L'initiation est une quête individuelle de l'éveil. L'éducation est un enjeu de société, et peut être considéré comme la forme collective et commune de l'initiation, avec toutes les limites qu'une telle démarche collective implique.
La voie initiatique se joue entre un maître et des disciples. Le maître a précédé ses disciples dans la voie initiatique qui l'a conduit vers une élévation de sa conscience, il maîtrise suffisamment sa nouvelle réalité et les éléments pédagogiques d'accès, pour à son tour dispenser un enseignement. Le maître est, vis-à-vis de l'élève, comme le parent à son enfant. Il n'est pas plus parfait qu'un autre, mais il sait distiller les messages et les frustrations sélectives amenant l'élève à recevoir et intégrer des injonctions et des messages relevant d'une logique d'un niveau supérieur. Exemple : accepter la douleur plutôt que de se révolter contre elle, en tant que partie intégrante dans l'ordre du monde et indissociable de celui-ci. Il ne s'agit ni de renier ni de justifier la douleur sur un plan de raison, mais d'intégrer son existence sur un plan de conscience supérieur - et donc de monter d'un cran sa relativisation -.
Quant aux enjeux éducatifs, Ken Wilber considère que l'humanité dans sa globalité a accédé à un niveau de conscience permettant bon an mal an à la plupart des individus de maîtriser les niveaux mythiques, analytiques, et présymboliques. Les enjeux de l'éducation résident dans le fait de produire des méthodes qui vont permettre à l'humanité dans son ensemble d'évoluer vers des niveaux de consciences toujours supérieurs. C'est la vocation des enseignants, des éducateurs, des professeurs, des Bodhisattva, et de ce point de vue des figures telles que Jésus-Christ, Lao Tseu, Bouddha ; dont la mission première - textes et récits à l'appui - (ou le rôle et sens symbolique premier) semble résolument éthique.

Dans la prochaine partie, nous reviendrons sur des considérations plus systémiques, en étudiant le modèle de Ken Wilber qu'il appelle "holoarchie".

A suivre...
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Message  SFuchs Lun 30 Jan 2017 - 13:43


Ken Wilber a produit son essai en pleine période d'enthousiasme quant aux propositions et découvertes de la nouvelle physique. Nous pensons notamment aux théories holographiques, à la formalisation des mathématiques relatives aux figures fractales, à la modélisation numérique naissante permettant de visualiser les attracteurs étranges et les figures du chaos déterministe. C'est dans ce contexte que la tentation d'unifier les trois niveaux de la réalité physique/mental/esprit va prendre une nouvelle forme.

Ainsi, beaucoup de vulgarisateurs scientifiques vont s'appuyer, par exemple, sur les propriétés holographiques du cerveau dans le processus de mémorisation, pour présenter un nouveau réductionnisme visant à expliquer les activités mentales supérieures - dont le cerveau est le substrat - à l'aide d'extrapolations tirées d'observations physiologiques.
De la même façon, les vulgarisateurs ayant mal compris le propos de David Bohm et ses théories sur l'ordre implié/implicite, et l'hypothèse de l'holomouvement, seront tentés de réduire une nouvelle fois la réalité du niveau de l'esprit à la réalité du niveau le plus subtil de la manifestation physique : celui se situant dans les domaines des dimensions minimales de la physique quantique. On peut parler d'une nouvelle confusion Pré/Trans, basée sur la confusion entre l'Unitas et l'Alteritas, le minimum et le maximum, le point destination-source de l'évolution et le point d'éloignement maximum consécutif à l'involution.

Ken Wilber propose de démystifier tous ces concepts et amalgames selon un modèle très simple qu'il nomme : holoarchie. L'holoarchie se base sur l'idée qu'il existe effectivement un fonctionnement holographique dans l'Univers, mais que ce fonctionnement holographique s'effectue entre éléments d'un même niveau de réalité, mais pas entre éléments de niveaux différents de la hiérarchie de la réalité ou hiérarchie systémique. En ce qui concerne les relations entre éléments des niveaux différents de la hiérarchie esprit/mental/corps, il vaut mieux raisonner en terme d'émergence et de support, et parler d'une "relation d'interpénétration multidimensionnelle avec non-équivalence".

Ainsi par exemple :

- Sur le niveau physique, il faut interpréter cette réalité holographique comme la conséquence somme toute assez triviale de l'interaction des éléments physiques entre eux. Puisqu'il y a interaction des éléments physiques entre eux, le processus récursif de feedback conduit naturellement à ce qu'aucune partie ne soit étrangère à l'ensemble et que l'ensemble soit présent dans chaque partie.

[Fiche de lecture] Les Trois yeux de la connaissance - Ken Wilber Nickieatmirror

- Dans le domaine intersubjectif : Le rapport entre moi et autrui est également de nature récursif/holographique : Je suis conscient de moi-même parce qu'autrui me regarde et que j'intègre autrui en train de me regarder. Ma conscience d'exister est indissociable de la conscience d'autrui que j'existe, dans un jeu de miroir des consciences se déployant "à l'infini". De façon connexe : les idées et opinions sont influencées par la façon dont elles sont perçues et donc qu'elles suscitent elles-mêmes, dans un jeu de miroir interactif symbolique.
Exemple : le schéma auto-réalisateur. La méfiance produit la crispation qui conduit à la méfiance, la confiance conduit à la détente conduisant à la confiance (sans compter toutes les variantes et subtilités basées sur ce schéma premier).

- Dans les domaines spirituels : on imagine le phénomène à l'identique, sous l'appellation générique de communion spirituelle, sans qu'il soit possible de discourir longuement sur le sujet à partir du plan de la raison.

Quant à l'aspect hiérarchique, il met en évidence la non équivalence des interactions entre éléments d'un même niveau et éléments de niveaux différents d'une part, et d'autre part la non équivalence des relations entre les éléments selon leurs places respectives dans la hiérarchie.

Exemples :

- L'esprit embrasse la conscience mais la conscience devine l'esprit.
- Chacun est capable d'interagir intensément avec autrui, en revanche les possibilités de communiquer et d'interagir en conscience diminue très rapidement avec les éléments qui s'en éloignent. Il est encore possible d'établir une sorte de philia légèrement asymétrique entre l'homme et l'animal domestique (et dont la co-présence physico-corporelle joue un rôle d'autant plus important), en revanche c'est peine perdu avec le règne végétal.

En résumé :

- La réalité se déploie de façon holographique au sein de chaque niveau, mais par de façon "holographique intégrale" entre les niveaux.
- La réalité s'organise selon une hiérarchie dont il faut tenir compte pour déceler les erreurs théoriques catégorielles (confusions entre les niveaux de réalité) ou conduisant au réductionnisme et à l'effondrement hiérarchique (explications - relatives à un niveau - généralisées à tous les autres niveaux comme le scientisme ou le sociologisme, par exemple).

Ajoutons à cela qu'on peut parler de récursivité à double titre. Elle se comprend selon l'holographie qui se manifeste sur chaque niveau de réalité, mais aussi selon le déploiement fractal d'un même motif sur chacun de ces niveaux. Il s'agit néanmoins de deux logiques récursives résolument différentes. Ce motif est présenté par Ken Wilber comme suit, et c'est selon se motif que la matière s'élève et s'éveille à l'esprit (dont elle a initialement jailli selon la cosmogénèse de Ken Wilber).

[Fiche de lecture] Les Trois yeux de la connaissance - Ken Wilber Wilber_02

[Fiche de lecture] Les Trois yeux de la connaissance - Ken Wilber 1_mif_log

Ce motif rejoint le MIF (Modèle d'Intégration Fonctionnel) basé sur le ternaire causal "matériel/efficient/formel", il est une représentation alternative et équivalente de la dynamique d'auto-organisation, par ailleurs décrite par Ilya Prigogine.

A suivre...

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Message  SFuchs Mar 31 Jan 2017 - 15:26


Dernière partie : propositions générales pour la définition d'une science intégrale.

En guise de conclusion, nous présenterons l'ensemble des éléments qui, selon Ken Wilber, doivent être présents dans une science intégrale répondant aux besoins d'un nouveau paradigme scientifique.
Les paradigmes anciens ont fait long feu : rationalisme analytique, réductionnisme scientifique, approches dualistes opposant artificiellement une proposition et son contraire dans une logique binaire de tiers exclu. D'autres paradigmes sont, aujourd'hui encore, dans l'air du temps et solidement ancrés dans les opinions et les esprits : citons par exemple le sociologisme et ses dérivés tels que le matérialisme dialectique ou encore le libéralisme.

Par science, nous entendons la connaissance, et la méthode pour valider celle-ci. Entendu ainsi, la science englobe tout aussi bien la recherche scientifique classique (astrophysique, physique de l'infiniment petit, biologique, génétique), que la recherche phénoménologique et ses dérivés (philosophie, herméneutique, phénoménologie, psychanalyse, sciences dures abstraites telles que la topologie ou la géométrie), et enfin la gnose ou science relative aux niveaux de l'esprit.

Ken Wilber considère donc que toute science intégrale devrait a minima posséder les éléments suivants :

- Une reconnaissance des trois niveaux de la réalité et de la nature holoarchique de leurs rapports mutuels. La compréhension de l'aspect holoarchique de la réalité permettra d'identifier les confusions Pré/Trans des théories, savoirs et connaissances présentes et à venir, ainsi que de nous garder de tout réductionnisme par effet d'effondrement de la hiérarchie systémique, en vertu du fait que sous le Soleil de l'Absolu, rien ne ressemble plus à une Ombre qu'une autre Ombre.

- Une méthodologie d'acquisition des savoirs et de leur validation, répondant aux enjeux de leur approbation et validation en tant que savoirs à caractère objectif. Pour ce faire, Ken Wilber propose une méthodologie à trois temps, qu'il perçoit comme étant commune aux sciences des trois niveaux physique/mental/esprit.

Temps 1 : l'injonction. "Pour vérifier ceci, vous devez réaliser cela"
Temps 2 : l'illumination : "M'étant placé dans les dispositions adéquates répondant à l'injonction, je relève et consigne mes observations"
Temps 3 : la validation : "Je compare mes données avec les données de mes pairs dans le domaine concerné, qui viennent valider ou invalider la qualité et la conformité de l'expérience que j'ai mené d'une part, et le résultat de mon expérience d'autre part".

Illustrons ces trois temps à trois domaines différents

Dans le domaine des sciences physiques (niveau physique) :
* le montage de laboratoire
* la collecte de données par la mesure
* la comparaison et l'approbation du montage et de la collecte afférente de données par les pairs de la communauté du domaine de recherche en question

Remarque : A titre exceptionnel mais comme cela arrive régulièrement dans l'histoire des sciences, l'expérience vient parfois remettre en question et bouleverser le consensus existant pour conduire la communauté vers un nouveau consensus et meilleur savoir. (les découvertes de Newton, par exemple).

Dans le domaine philosophique et universitaire (niveau mental) :
* l'acquisition des oeuvres, pensées et systèmes de pensées des philosophes reconnus et retenus comme tels
* la production d'une oeuvre se positionnant par rapport aux oeuvres déjà existantes
* l'approbation par les pairs de la qualité de compréhension des oeuvres et du travail fourni

En psychanalyse (niveau mental) :
* l'acquisition de données par les méthodes telles que l'association libre (Freud), la méthode clinique (Piaget), le dilemme moral (Kohlberg), l'association de mots (Jung) etc.
* la production d'une herméneutique sur la base de ces données
* la discussion sur la qualité ou le caractère universel (objectif) de l'interprétation (subjective) qui en est faite.

Remarque : dans les domaines pré-cités, à cheval entre caractère objectifs et subjectifs des savoirs, il faut distinguer les théories et idées en vogue de celles qui seront retenues par l'histoire. Ainsi, Ken Wilber considère que l'association libre est une méthode freudienne rompue et reconnue, mais que les interprétations phallocratiques que Freud tire de l'étude de ses patients relève autant voire plus du biais culturel de Freud qu'elles révèlent une vérité profonde et universelle (au moins en l'état) de la psyché humaine.

Dans les domaines spirituels (niveau de l'esprit) :
* la pratique méditative assidue et l'ascèse dans une relation Maître/Disciple conduisant l'apprenti méditant au seuil de l'expérience mystique
* la (les) vision(s) du nouveau méditant
* la validation par le Maître de la qualité de la vision spirituelle de l'élève (s'agit-il réellement d'une vision, et non d'une hallucination, par exemple)

Remarque : Ken Wilber considère que, d'une certaine façon, la qualification et la validation d'un certain nombre de visions spirituelles et d'expériences mystiques est une preuve de l'existence de Dieu, en vertu de la récurrence de ces visions en terme de vécu, d'expression et de forme, y compris selon des traditions et méthodes méditatives différentes.

Conclusion générale : A vos commentaires !

Fin
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Message  patanjali Mer 1 Fév 2017 - 10:06

Je remercie SFuchs de nous résumer sa lecture du livre de Ken Wilber. Je me rends compte de la difficulté de son travail de synthèse.

Lorsque j’ai découvert  en librairie « Les trois yeux de la connaissance » peu après sa parution (1987), je cherchais déjà à faire un lien entre les philosophies orientales et les nouvelles conceptions systémiques. Je connaissais la trilogie des gunas du yoga-samkhya. J’avais découvert aussi dans le principe d’antagonisme de Lupasco une logique des relations systémiques dans le sens du yin-yang taoïste. Mais je ne voyais pas comment concilier cette  logique de complémentarité des contraires avec le principe de contradiction exclue et le syllogisme d’Aristote, si importants pour la science et les mathématiques mais que j’avais trouvés suspects et incomplets déjà lorsqu’il m’avait été enseigné en philosophie thomiste dans un collège catholique.

Ken Wilber m’a apporté une clé décisive pour réunir la tradition orientale et la science occidentale. Il a très bien décrit les trois niveaux de la connaissance en ce qui concerne leurs objets différents. Je m’en suis largement inspiré.  Mais j’y ai vu surtout une solution au problème des logiques différentes : la contradiction exclue concernant les sensations, la complémentarité des contraires pour les relations ou interactions dynamiques et la synthèse des opposés des symboles paradoxaux de l'être.

J’ai mieux compris les confusions de niveaux que dénonçait Wilber, pourtant je n’ai pas trouvé dans son livre une distinction claire de ces logiques et je ne me souviens pas s’il a parlé de la logique d’analogie qui relie les niveaux.  Mais comme mon intérêt concernait la systémique en biologie et en médecine, et que les points de vue psychologistes et sociologistes m’intéressaient moins, je n’ai lu le reste qu’en diagonale.
Aussi, c'est du point de vue de la médecine que j’ai compris et traduit la trilogie de la connaissance dans mon livre « Les trois visages de la vie ».

Les fiches de lecture de SFuchs me rappellent ce que j’ai pu négliger et me permettent d’exprimer mon point de vue dans les messages à suivre.
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Message  patanjali Mer 1 Fév 2017 - 17:51

Concernant les erreurs catégorielles:

Wilber présente le dogmatisme spéculatif de l’Église médiéval comme exemple d’erreur catégorielle du rationalisme, confondant  rationalisme et dogmatisme. Il reconnaît la Renaissance comme une forme de révolte contre cette emprise totale de l'Eglise et un retour au réalisme de l’observation empirique sur laquelle se construit la science.

Mais cette réaction se manifesta aussi par le retour de la contemplation mystique sous différentes formes ésoériques (cabale, alchimie, hermétisme) , mais aussi  par une dernière flambée de la gnose néoplatonicienne dans le sillage de Bonaventure et des franciscains mystiques, avec Nicolas de Cues qui influença Giordano Bruno et Descartes, sans compter le néoplatonisme médicéen de Marcile Ficin et Pic de la Mirandole qui cependant étaient surtout des érudits traducteurs et commentateurs.

Dès le 13ème siècle, l’Église romaine avait préféré le rationalisme de Thomas d’Aquin à la contemplation mystique de Bonaventure. En adoptant  l’empirisme d’Aristote et  sa logique de contradiction exclue, devenue l’arme de l’Inquisition,  elle a ouvert elle-même la porte au réductionnisme scientiste et au puritanisme protestant qui a remplacé le symbolisme liturgique par l’enseignement littéral des écritures saintes.

La gnose néoplatonicienne qui influença la formulation et l’unité du symbole trinitaire chrétien, fut définitivement tuée en 1600 avec Giordano Bruno, alors que cette année-là est célébrée,  (selon les citations de Wilber) comme naissance de la mesure et  de la quantité, grâce à Galilée et Kepler.
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Message  patanjali Jeu 2 Fév 2017 - 8:45

Le mérite de Wilber est d’avoir redécouvert la compréhension globale trinitaire de la connaissance de la tradition néoplatonicienne.  Il a clairement décrit les contenus différents de la connaissance par les sens, par la raison et par l’intuition. Son schéma qui réunit  les trois niveaux (2-3-4) au Mental indique bien que celui ci réunit les trois yeux ou modes de connaissance. C’était bien dans ce sens que Platon accordait le rôle prioritaire à l’Intellect, qu’il ne faut pas confondre avec le rationalisme aristotélicien ou mathématicien.

Wilber définit bien les erreurs catégorielles qui consistent à expliquer tout à partir d’un seul œil ou mode de connaissance. Pourtant c’est une nécessité de choisir un point de vue pour examiner un problème particulier et cette méthode analytique est indispensable en science. Les points de vue sont multiples et chaque point de vue a ses limites qu’il faut reconnaître pour pouvoir rester ouvert à d’autres points de vue. Une erreur catégorielle signifie une restriction du domaine de connaissance, une définition. Elle ne signifie pas que c’est faux mais que c’est insuffisant.

Ainsi, le point de vue de Wilber a lui même  ses limites. En tant que psychologue il met la priorité sur l’élévation du Mental de la sensation matérielle vers l’intuition transcendantale dans une évolution linéaire pré-trans. Il dénonce surtout et avec raison l’erreur catégorielle des scientistes du début du vingtième siècle d’avoir voulu réduire l’univers et l’esprit à la matière. En notre ère postmoderne la science tend  plutôt à les réduire au rationalisme mathématique et informatique.
Mais on pourrait aussi reprocher à Wilber son point de vue psychologique, réduisant le réel à la connaissance. Il rejoint d’ailleurs un peu la mode en psychologie et philosophie modernes, depuis l’idéalisme allemand et dans la suite de Husserl, de réduire l’univers à l’intersubjectivité. Ce réductionnisme peut aller jusqu’à prétendre que c'est notre conscience qui produit le réalité physique. L'erreur trans-pré est aussi absurde que l'erreur pré-trans du scientisme.

Si Wilber ne comprend pas les conceptions des archétypes de Jung, c’est parce qu’il reste dans une conception hiérarchique linéaire de la connaissance et de l’univers. Je pense que les archétypes doivent être compris comme des manifestations de contenus à la fois prépersonnels et transpersonnels puisqu’ils sont d’origine transcendante. Je les comprends dans le sens circulaire, biologique, de  vie et de mort ou dans le sens du champ morphique de Sheldrake.

Alors que la compréhension européenne et monothéiste du monde est essentiellement hiérarchique, certaines cosmogonies traditionnelles majeures sont fondées sur l’équilibre et le retour cyclique. Tel est le cas du taoïsme, du mysticisme solaire égyptien et des trois gunas du Samkhya-yoga (mon avatar). Même Nicolas de Cues decrit l'univers par un cycle comprenant un processus créatif de l'unité vers l'altérité suivi d'un retour cognitif de l'altérité vers l'unité.
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Message  patanjali Jeu 2 Fév 2017 - 18:18

En  ce qui concerne le mythe de la chute, je m’associe à l’opinion exprimée par Freya dans Eden, Adam et Eve.
Je ne crois pas plus à une décadence qu’à un progrès inéluctables de l’humanité en général. Il y a pour chaque culture particulière un épanouissement, une apogée et une décadence. On peut le constater par l’histoire des empires aussi bien que dans les situations géostratégiques actuelles.
L’évolution individuelle enfance, adulte, vieillesse suit le même étapes.

Je ne me prononce pas sur le destin téléologique, ce n'est pas mon rôle d'être gourou et de disserte au sujet de réalités inconnaissables. En ce qui concerne l’initiation à une voie spirituelle, je pense qu’elle est utile au départ mais peut être un obstacle en tant qu’attachement au maître ou à la doctrine. L’éveil spirituel, comme toute maturité, exige d’être adulte, autonome et libre. Les grands mystiques, comme François d’Assise ou Jakob Boehme ont atteint un éveil spontané sans initiation, en dépit plutôt que grâce aux doctrines. Cela me laisse sceptique à propos des religions ou autres voies ésotériques tracées.
Quant à l’éducation, elle obtient au mieux un vernis social ou au pire un endoctrinement. Selon mon expérience comme pédiatre et père, les déterminismes innés et les aléas des rencontres vécues marquent essentiellement la personnalité individuelle.

Alors que les dérives du réductionnisme scientiste sont bien connues, celles du sociologisme et de l’humanisme qui caractérise les sociétés occidentales  et leurs  religions sont moins bien perçues.
A mon sens, une dérive dans le sens anthropocentrique est caractéristique de la civilisation européenne. Elle a commencé avec l’humanisme grec, ou déjà avec les mythes anthropomorphes grecs. L’importance donnée par Socrate et Platon aux relations humaines a influencé les conceptions du monothéisme chrétien. L’affirmation que l’homme est la mesure de toute chose est restée un mythe qui a influencé les conceptions chrétiennes et s’est prolongée jusqu’aux théories scientifiques de la relativité, du big bang et de la théorie anthropique. Les modes ont passé du conservatisme social garanti par l’Église au libéralisme individualiste garanti par les droits de homme mais elles restent humanistes et anthropocentriques.
Les hautes cultures égyptienne ou orientales aussi bien que les cultures proches de la nature comme celles des amérindiens ne considèrent pas l’homme comme maître mais comme serviteur de la nature.
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Message  patanjali Ven 3 Fév 2017 - 11:37

Certes, "Ken Wilber a produit son essai en pleine période d'enthousiasme quant aux propositions et découvertes de la nouvelle physique". Cela concernait l’holographie, les théories des chaos, la théorie fractale et sur un plan plus théorique la systémique.
Le système a été défini initialement sur la base des relations sous forme de la rétroaction ou feedback, qui a d’ailleurs donné lieu à la formulation du principe d’antagonisme de Lupasco. La cybernétiques de cette époque, l’école  de Palo Alto et le constructivisme ou structuralisme, ont influencé Wilber comme la plupart des psychologues et sociologues, qui se sont appropriés le terme de systémique.

La méthode appelée "approche systémique" qui conçoit les relations  sur le mode déterministe de la rétroaction, est pratiquée aujourd’hui encore par les psychiatres en "thérapie familiale". Cette doctrine supposant que  tous les enfants naissent égaux, postule que leur évolution psychique  est déterminée par l’éducation et les relations familiales. Par conséquent elle attribue les troubles de comportement de l’enfant à sa famille. Ainsi  les parents sont tenus responsables de tout comportement anormal et la thérapie dite familiale se résume au dialogue à trois entre le thérapeute, le patient victime et ses parents coupables. J’ai été comme pédiatre témoin des échecs chez des adolescents de cette approche qui néglige les tendances innées et les influences aléatoires souvent négatives des camarades, de la rue et du virtuel violent des médias d’une société en décadence, des influences externes que les pauvres parents sont dans l’incapacité de connaître ou de contrôler.

Wilber ne pouvait se référer qu’à ces conceptions cybernétiques et analytiques connues au moment où il a écrit son livre, des conceptions correctes mais insuffisantes. Son schéma en croix présente seulement des rétroactions déterministes et ne rend pas compte de la variété qualitative. Sa méthode (injonction, illumination, validation) est une variation du schéma hypothético-déductif de la méthode expérimentale fermée. Elle n’a comme critère que le consensus mais n’explique pas l’imagination scientifique à l’origine des hypothèses. L’holoarchie se réfère aux similitudes entre niveaux découvertes par von Bertalanffy  et qu’il appelait homologies. Elles ont été expliquées par les homothéties fractales de Mandelbrodt. Mais Wilber manquait de  principes ou algorithmes pour expliquer la hiérarchie holistique.

Cette approches systémique classique est insuffisante et obsolète depuis la découverte de la théorie des chaos et de l’auto-organisation de H. Atlan et de I. Prigogine. Même Wikipédia le reconnaît à présent sur sa page de la systémique.
Sont historiquement distinguées deux grandes phases, souvent dites « première » et « deuxième » systémiques : la première (des années 1950 à 1970) souvent considérée comme statique, centrée autour des systèmes théoriques fermés étudiés en France par le structuralisme, aux États-Unis par la cybernétique et la théorie de l'information ; la deuxième systémique à partir des années 1970 avec l'apparition des concepts d'émergence et d'auto-organisation, débouchant sur une conception plus ouverte et davantage appliquée des systèmes complexes.

Wikipédia reste dans les généralité quant aux principes et méthodes. Pourtant, ce n'est pas sorcier, ceux-ci sont connus et appliqués depuis des millénaires dans les médecines traditionnelles orientales, chinoise, indienne et tibétaine. Trois principes premiers sont connus de toute tradition sous des noms et symboles qui varient selon la culture, le niveau de connaissance ou le contexte, mais qui ont toujours le même sens fonctionnel. Ils sont redécouverts par la science sous les noms banals de matière, énergie et information. Je préfère les désigner par les concepts plus abstraits des causes matérielle, efficiente et formelle. Les éléments des traditions résultent des rapports réciproques des trois principes ou qualités, nommés Gunas en médecine ayurvédique.

La méthode holistique est simple. L’unité est symbolisée par la sphère et sa projection, le cercle. Il est connu que trois points quelconques définissent un cercle. Ils définissent un triangle inscrit dans un cercle qui symbolise le système. Si les côtés du triangle sont égaux, ce triangle équilatéral symbolise l’équilibre idéal. Mais tous les rapports entre les côtés sont possibles et définissent l’état du système, ses qualités ou défauts. Les proportions entre trois côtés ou trois grandeurs sont numériquement définissables. C’est exactement ce qui est fait pour les rapports entre des trois couleurs principales, rouge, bleu, vert, dans la composition personnalisée des couleurs de nos traitements de texte. L’exemple des couleurs montre que toute variété des qualités peut être formulée par le rapport de trois principes.

Il faut se souvenir aussi du problème des trois corps de Poincaré. Entre deux acteurs une relation déterministe s’établit. Entre trois acteurs les relations deviennent indéterminées et variables, elles dépendent des résonances, des rapports de longueurs d’onde stationnaire réciproques. La méthode holistique fondée sur trois principes diffère donc des schémas expérimentaux classiques fermés et déterministes.

La compréhension et l’application de la méthode systémique par auto-organisation exige le retour non seulement de la logique de complémentaritédes contraires mais aussi le retour de l’analogie de proportionnalité, une logique que notre pensée utilise spontanément et inconsciemment, qui induit l’intuition, l’imagination et les choix, mais que la science a cru devoir rejeter.
Dans ces conditions les trois principes peuvent être traduits en termes axiomatiques appropriés et associés à une évaluation statistique pour obtenir une évaluation globale de l’état du système.
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Message  Freya Mer 8 Fév 2017 - 18:58

Voici comment je vois les choses :

[Fiche de lecture] Les Trois yeux de la connaissance - Ken Wilber Medsor10

L’âme est placée au milieu parce que c’est au travers d’elle, que l’entité consciente s’exprime vie après vie au moyen d’un corps physique (Ouest), des émotions (Sud) et du mental (Nord) en utilisant l’énergie directrice de l’Esprit (Est) qui caractérise sa personnalité permanente.

La « sensibilité » du corps physique : le corps physique ne ressent que par le toucher et donc les choses sont agréables ou désagréables, mais il ne ressent nullement les émotions. Pour ressentir ces dernières,  nous sommes dotés d’un « corps » émotionnel qui nous permet d’éprouver l’émotion et le désir, la joie et l’amour ainsi que des sentiments d’exaltation mais aussi des sensations de malaise voire de tristesse. Ce « corps » émotionnel  est capable de capter les vibrations du corps physique et du corps éthérique ou corps d’énergie, et de changer la pensée en sentiment et vice versa. Et  les maladies d’origine émotionnelle trouvent justement  leur source dans ce corps « émotionnel ».

Le mental agit à tout les niveaux, il a également son "corps".


…la connaissance directe est connue sous le nom de gnose, et l'expérience spirituelle sous les appellations d'illumination, d'extase ou de communion spirituelle. Il n'existe pas à proprement parler de rapport écrit ou livresque pouvant rendre compte de ce type de connaissance, qui se transmet par l'initiation, l'élévation du moi au dessus du mental, et relève ensuite de l'expérience personnelle et individuelle (même si les personnes essayant d'expliciter par des mots ce qu'ils ont vécu recourent de façon récurrente aux mêmes images et formules).

Pour passer d’un état de conscience ordinaire à un état méditatif par exemple, il suffit de signaler clairement à notre mental subconscient que l’espace et la période passent au travail méditatif ou créatif. Et quand ce laps de temps est terminé, il suffit de donner à nouveau un signal clair à notre mental subconscient de revenir à la conscience ordinaire de l’activité quotidienne. Pour ce faire on peut simplement allumer une bougie puis l’éteindre, une fois la cession terminée.

S'il s'agit d'approcher l'esprit avec des formules et des mots, la formule paradoxale semble être le meilleur recours.
L’Esprit ne s’exprime pas par mots mais par image ou par symbole.


…la connaissance directe est connue sous le nom de gnose, et l'expérience spirituelle sous les appellations d'illumination, d'extase ou de communion spirituelle. Il n'existe pas à proprement parler de rapport écrit ou livresque pouvant rendre compte de ce type de connaissance, qui se transmet par l'initiation, l'élévation du moi au dessus du mental, et relève ensuite de l'expérience personnelle et individuelle (même si les personnes essayant d'expliciter par des mots ce qu'ils ont vécu recourent de façon récurrente aux mêmes images et formules).
Pour les expériences mystiques, c’est une question d’ondes sur lesquelles fonctionne le cerveau (ondes Thêta et Delta)et qui permettent une expansion de la conscience. L’illumination quant à elle, ne peut être transmise car elle ne peut être que « donnée » par la Source.

Dans les domaines spirituels (niveau de l'esprit) :
* la pratique méditative assidue et l'ascèse dans une relation Maître/Disciple conduisant l'apprenti méditant au seuil de l'expérience mystique
* la (les) vision(s) du nouveau méditant
* la validation par le Maître de la qualité de la vision spirituelle de l'élève (s'agit-il réellement d'une vision, et non d'une hallucination, par exemple)
Le mot « Maître » me fait dresser les cheveux sur la tête ! Je préfère et de très loin, le mot « Guide ». Un Guide, un vrai, n’accepte pas que « l’Aventurier Spirituel » se prosterne devant lui par exemple. Il reste humble en dépit des connaissances et de la sagesse acquises au cours de très nombreuses années, il ne se prend par un VIP, il ne cherche pas à se constituer une clientèle, il accepte d’aider bénévolement celui qui vient vers lui.  

Pourquoi une vision serait-elle une hallucination du moment que le méditant ne prend ni drogue, ni alcool, etc. ?
Pourquoi, le Guide devrait-il contrôler la vision du méditant ? Ce n’est pas son rôle, mais le méditant peut lui en parler s’il le souhaite.

Un Mandala est un symbole circulaire universel qui, tout en étant une expression de la plénitude contenue dans la totalité de la vie, est un symbole du Soi et de la Source.
Une Roue Médecine ou Roue de Vie est un dispositif symbolique pour acquérir des connaissances, en particulier sur soi-même, et pour établir des connexions aux différents niveaux de la réalité.
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Message  SFuchs Ven 10 Fév 2017 - 17:21

Bonjour Freya,

Oui je pensais au sens que tu utilises pour Guide. Disons que le mot "Maître", on le retrouve régulièrement dans la littérature dédiée à l'éveil, à l'apprentissage ou à l'initiation. Mais effectivement ce mot possède une charge particulière qui n'est a priori pas dans le bon esprit pour une relation de croissance harmonieuse de l'élève.
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